News

Taxe sodas : des bénéfices pour l'Etat, pas pour la santé

13 août 2019

Les accises sur les boissons rafraîchissantes additionnées de sucre rapportent 175 millions/an à l'Etat, mais rien à la santé publique. La quantité de sodas consommée par les Belges ne diminue pas. Taxer certains produits pour lutter contre l'obésité ne suffit pas, une approche globale est nécessaire!

Depuis 2015, le gouvernement prélève une taxe sur les boissons contenant du sucre ou d'autres édulcorants, tels que le cola, la limonade et l'eau aromatisée. Cette année-là, l’accise s’élevait à 3 cents par litre de boisson sucrée. Puis, cette taxation a été sévèrement revue à la hausse. D’abord en 2016, puis à nouveau début 2018, ou elle est passée de 6,8 à 11,9 cents le litre. Aujourd’hui, vous payez une taxe de santé de 18 centimes pour une bouteille de cola de 1,5 litre de 2,08 €, soit plus de 8% du coût total.

Cette taxe, et donc cette augmentation de prix, a comme objectifs théoriques de décourager la consommation de ces boissons contre-indiquées, de stimuler un modèle d’alimentation plus sain et de faire diminuer la pression croissante sur notre système de soins. 

Force est de constater qu’il s’agit surtout d’une opération juteuse pour le Trésor public qui empoche le produit de la taxe qui a triplé en trois ans, passant de 55 à 175 millions d’euros/an. Des droits d'accise qui rapportent donc plus que ceux sur le vin et légèrement moins que ceux sur la bière.

Par contre, niveau santé publique on est loin du compte. L’important est bien entendu de savoir si une telle taxe freine réellement votre consommation. Et la réponse est claire : non.

Pas moins de sodas dans les caddies

En 2016, lors de la première augmentation des droits d'accises, la quantité de boissons non alcoolisées vendues en Belgique a diminué (-59 millions de litres). Mais la tendance s’est inversée en 2018, malgré la nouvelle augmentation des droits d'accises. Les volumes de vente ont augmenté de plus de 40 millions de litres. Les premiers mois de 2019 montrent eux une stagnation.

Cette taxe santé n'a donc aucun effet sur votre comportement d'achat. Une faible taxe augmentée petit à petit, comme cela se passe actuellement, ne crée pas d’effet-choc. Le consommateur s’habitue simplement à ces nouveaux prix sans modifier son comportement.

Notre enquête réalisée il y a quelques années auprès d’environ 800 consommateurs montre que le Belge n’affectionne guère les taxes sur les aliments sucrés ou riches en matières grasses. La majorité considère que le gouvernement a pour tâche d'informer et de promouvoir de saines habitudes alimentaires, mais cette même majorité estime aussi que l’Etat ne doit pas trop s’ingérer dans ce qui finit dans notre assiette.

Quatre répondants sur cinq estiment que le gouvernement devrait faire des efforts pour faire baisser le prix des fruits et légumes. En revanche, un sur deux est favorable à une taxe sur les aliments à éviter à condition que le produit de la vente soit investi dans des campagnes de prévention. Selon notre enquête, il faudrait que la taxe s’élève au moins à 20 % pour que près de 6 Belges sur 10 renoncent à acheter ce type de produits.

Au final, ce sont surtout les Belges moins aisés qui ressentent l’impact financier d’une telle taxe. Cela étant, ce sont également eux qui vivent et mangent en général de manière un peu moins saine et qui risquent donc davantage de devenir obèses.

Une approche globale est nécessaire

Le problème de l’obésité exige une approche globale et transversale. Il est grand temps de définir une politique claire, assortie d’objectifs concrets et d’un suivi rigoureux.
Une augmentation des taxes sur les produits dont il faut limiter la consommation peut faire partie d'un plan global de nutrition, mais ne sera jamais aussi efficace que d’autres mesures comme un meilleur étiquetage, de plus petites portions et une baisse du prix des aliments sains.

Il est plus important de promouvoir une alimentation saine et équilibrée que de proscrire les produits riches en sucre et en graisses. C’est pourquoi nous plaidons pour une approche globale.

  • Nous ne sommes pas opposés à une taxe santé, mais la taxe doit être suffisamment élevée, à savoir 20% ou plus, pour avoir un effet réel sur le comportement. Et elle doit s’accompagner de campagnes de prévention pour une alimentation saine. En outre, l'accent doit être mis sur la globalité des aliments à éviter et pas uniquement sur les boissons sans alcool.
  • Pour favoriser une alimentation plus saine, il convient entre autres de diminuer le prix de certains produits  tels que les légumes, les fruits et les aliments à base de céréales complètes. L'eau doit également être disponible dans les lieux publics via des fontaines. Les revenus générés par cette taxe doivent bien évidemment être utilisés à cette fin, ainsi que pour mener des campagnes de prévention dans les rues, l’enseignement et les médias.
  • Les autorités doivent utiliser les moyens dont elles disposent pour encourager les marques à modifier leurs recettes ou à réduire leurs portions, et fournir au consommateur des informations claires sur la composition des produits. Avec l'introduction du Nutri-Score en Belgique l'année dernière, les consommateurs disposent déjà d'un outil simple pour les aider à faire des choix plus sains en un coup d'œil.

 Signez la pétition pour rendre le Nutri-Score obligatoire en Europe