En combinant épargne-pension et épargne à long terme, il est possible d’épargner chaque année jusqu’à 3 800 euros. Avec à la clé un avantage fiscal s’élevant jusqu’à 30% du montant investi.
Mais cet argent est normalement bloqué jusqu’à 60 ans. Il ne peut donc pas être utilisé pour financer l’achat d’un logement, sauf à payer une lourde pénalité financière de 33%.
L’idée du CD&V (qui n’a pas encore été discutée au sein du gouvernement) serait de permettre aux jeunes de libérer par anticipation une partie de leur épargne-pension pour financer leur premier bien immobilier. La taxe de 8% (normalement prélevée à 60 ans) serait immédiatement due sur le montant retiré.
Si la mesure vise à aider les jeunes ménages à accéder plus facilement à la propriété, nous pointons plusieurs effets pervers qui pourraient, à long terme, faire plus de mal que de bien.
Un avantage qui ne profite pas à tous
Le principal problème est l’inégalité des chances. Ce nouveau dispositif favoriserait surtout les personnes capables d’épargner près de 4 000 euros par an, soit les ménages disposant déjà de revenus confortables. Les jeunes aux revenus modestes ou en situation précaire auraient peu ou pas accès à cet avantage fiscal, ce qui risquerait d’accroître encore les inégalités sur le marché immobilier.
Une pression supplémentaire sur les prix immobiliers
En offrant à davantage de jeunes un capital supplémentaire pour acheter, le dispositif pourrait aussi alimenter la hausse des prix de l’immobilier. Ce qui aiderait certains acheteurs à court terme, mais rendrait l’accès à la propriété encore plus difficile pour d’autres à moyen et long terme. Il ne faudrait pas que ce nouvel avantage fiscal bénéficie en fin de compte aux vendeurs...
Un coût fiscal pour la collectivité
Le nouveau mécanisme inciterait plus de jeunes à utiliser la réduction d’impôt de 30%. Ce faisant, cela aura un impact sur les recettes de l’État, sans avoir la certitude qu’en fin de compte la mesure bénéficie réellement aux jeunes acheteurs (voir point précédent).
Un risque politique bien réel
Autre point d’attention : le risque de changement de cap politique. Les régimes fiscaux de l’épargne-pension et de l’épargne à long terme ont déjà été modifiés à plusieurs reprises par le passé. Rien ne garantit que cette nouvelle formule restera stable dans le temps.
Moins d’argent à la retraite
En autorisant le retrait anticipé de l’épargne-pension, une partie de l’argent destiné à compléter la pension serait utilisée pour le logement. Ce transfert pourrait, à long terme, compromettre la sécurité financière des épargnants au moment de la retraite.
Le piège de la branche 21
Quand on est jeune, il est préférable d’investir dans un fonds composé majoritairement d’actions. C’est plus risqué, mais à long terme, le rendement est plus élevé.
En revanche, si cet argent est en fin de compte destiné à financer l’acquisition du logement dans quelques années, mieux vaut jouer la sécurité et opter pour une assurance-épargne de la branche 21. Le rendement est moindre, mais le capital est garanti.
Mais que feront les assureurs si vous faites valoir votre droit à un retrait anticipé ? On sait en effet que les frais de sortie peuvent, en cas de cisconstances défavorables, atteindre 10 à 15% de l’épargne. Sans compter l’impôt final. Payer de tels frais est bien sûr impensable.
En outre, si une partie de l’épargne n’est finalement pas utilisée comme apport pour l’achat, le solde pourrait rester bloqué dans un produit de la branche 21, peu performant à long terme. Actuellement, il n’est en effet pas possible de transférer son argent d’une assurance-épargne de la branche 21 vers un fonds d’épargne-pension, plus rentable à long terme, sauf à payer une importante pénalité de 33%.
Les conditions que Testachats souhaite voir garanties
Pour rendre le dispositif plus équitable et transparent, Testachats formule plusieurs recommandations :
– Supprimer les frais de sortie.
– Limiter les frais d’entrée à 1% maximum.
– Améliorer la transparence des assurances-vie de la branche 21 : les rendements affichés doivent être nets de frais, et la participation aux bénéfices doit s’appliquer à l’ensemble de la réserve d’épargne.
– Permettre le transfert gratuit et sans taxation de l’épargne non utilisée vers un fonds d’épargne-pension dynamique, un produit de la branche 23 ou un ETF.
En résumé
Le plan du CD&V pourrait aider certains jeunes à devenir propriétaires plus rapidement, mais il présente de nombreux risques : moins de réserves pour la pension, des prix immobiliers encore plus élevés, un coût fiscal pour la collectivité et des produits d’épargne peu performants.
En fin de compte, la mesure profiterait surtout aux assureurs et aux ménages les plus aisés, tout en laissant de côté une partie des jeunes.