Warner Bros. pas encore dans la poche de Netflix
Faut-il investir en Bourse dans Netflix après la contre-offre de Paramount Skydance sur Warner Bros. Discovery ?
Faut-il investir en Bourse dans Netflix après la contre-offre de Paramount Skydance sur Warner Bros. Discovery ?
Si Netflix se négocie aujourd’hui à 30 fois les bénéfices de 2026, sa position de leader et la croissance bénéficiaire attendue (20 à 25%/an pour 2026 et 2027 hors Warner) n’en font pas une action chère pour autant. Le potentiel de développement de sa base d’abonnés est en outre loin d’être épuisé.
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Trois jours après l’offre de Netflix sur les activités de streaming (HBO Max et discovery+ ) et les studios de cinéma de Warner Bros. Discovery pour 72 milliards USD, Paramount Skydance a lancé sa propre offre. Une offre hostile, contrairement à l’offre de Netflix approuvée par les deux conseils d’administration.
Concrètement, Paramount propose 30 USD par action Warner Bros. Une offre entièrement en cash et qui porte sur l’ensemble du groupe. Pour rappel, Netflix offre 27,5 USD.
Mais à y regarder de plus près, l’offre de Netflix n’est pas moins généreuse car elle ne porte que sur les activités de streaming et les studios de Warner. La valeur du reste des activités, en recul structurel et qui n’intéressent pas Netflix (chaînes de TV CNN, Discovery,… via le câble) peut être estimée entre 3,5 et 4,5 USD par action Warner Bros.
D’un autre côté, l’offre de Paramount présente plusieurs avantages pour les actionnaires de Warner.
Pour commencer, elle est entièrement en cash, là où Netflix prévoit une partie (4,5 USD) en actions Netflix.
Ensuite, l’opération pourrait être réalisée beaucoup plus rapidement car elle porte sur l’ensemble du groupe. L’offre de Netflix est en effet conditionnée à la scission des activités TV traditionnelles de Warner Bros. via une nouvelle société cotée en Bourse dans le courant du 3e trimestre 2026.
Enfin, des obstacles réglementaires et politiques pourraient faire capoter l’opération avec Netflix. Donald Trump, proche de la famille Elisson à la tête de Paramount, s’est ainsi déjà montré hostile à l’offre de Netflix et l’autorité à la concurrence, qui devra se prononcer sur le deal, est sous pression.
En rassemblant les plus de 300 millions d’abonnés de Netflix et les 128 millions de HBO Max/discovery+, le nouvel ensemble accaparerait près de 35% du marché américain du streaming vidéo par abonnement (en heures visionnées), ce qui est plus que la limite de 30% qui pose généralement problème aux autorités à la concurrence.
De son côté, Paramount ne compte « que » 80 millions d’abonnés et sa part de marché (heures visionnées) sur le marché américain en cas d’absorption de Warner n’attendrait que 22% environ.
Netflix pourrait toutefois argumenter que le marché réel sur lequel il opère est bien plus large que celui du streaming payant. En comptant les chaînes de TV traditionnelles et Youtube, sa part de marché tombe de plus de 20% à 8% environ et celle du nouvel ensemble ne dépasserait pas les 14%.
Enfin, la concentration au niveau de la distribution à destination des cinémas pourrait aussi poser problème si Netflix ne souhaitait plus diffuser en salle les films produits par Warner (1/4 du box-office américain en 2025).
La bataille est donc loin d’être gagnée et dans une industrie où la course à la taille est primordiale (économies d’échelle dans la production), des surenchères ne sont pas à exclure. Et si transaction il y a, cela ne sera pas avant 1 à 1,5 an.
En cas d’échec de l’opération pour des raisons réglementaires, ou si Netflix se rétracte, il devra payer une lourde pénalité de 5,8 milliards USD, soit un peu plus de la moitié du bénéfice estimé pour 2025 (2,51 USD/action). Mais vu sa situation financière, cela ne sera pas de nature à l’ébranler ni à remettre en cause ses gigantesques investissements en nouveaux contenus (18 milliards USD/an).
Si Warner préfère Paramount, c’est Netflix qui sera dédommagé à hauteur de 2,8 milliards USD.
Si le rapprochement se conclut, Netflix, qui est déjà le grand gagnant du streaming avec une rentabilité bien plus élevée que ses concurrents, creusera encore l’écart.
Outre le gonflement de son chiffre d’affaires qui lui permettrait d’investir encore plus dans sa production et de rendre son offre encore plus attractive, l’opération lui permettrait de mettre la main sur certaines franchises les plus emblématiques d’Hollywood (Harry Potter, DC Comics, ...). Alors que seul Stranger Things peut prétendre à ce statut dans son catalogue, ce serait là un développement très appréciable de nature à renforcer la visibilité sur les résultats futurs (suites, séquelles, préquelles…).
Cours au moment de l’analyse : 96,71 USD
Fondé en 1997, Netflix était à l’origine actif dans les services de location de DVD envoyés par la poste sur base d’abonnements mensuels fixes. Dès 2006, face au piratage, les ventes ont plafonné avant de décliner. Netflix s’est alors complètement réinventé et a transformé l’industrie avec son offre SVOD. Pionnier avec ses premiers services dès 2007, le groupe a profité d’une concurrence, jusqu’en 2019, très limitée qui lui a donné le temps de se construire une large base d’abonnés dans plus de 190 pays (301,6 millions au 31/12/2024 - 30% en Amérique du Nord, 33% en Europe et au Moyen-Orient, 18% en Amérique Latine, 19% en Asie) et un joli catalogue de contenus.