Racheter ses années d’études: voyez d’abord combien ça rapporte

Les futurs pensionnés ont la possibilité de verser une cotisation afin que leurs années d’études entrent en ligne de compte dans le calcul de la pension légale. On parle de “rachat d’années d’études”. Le but étant d’augmenter ainsi le montant de sa pension.
En tout état de cause, pareille régularisation ne peut rapporter quelque chose qu’à celui ou celle qui, lors de son accession à la retraite, n’a pas encore une carrière complète. Pour beaucoup, c’est 45 ans ou, plus précisément, 14 040 jours (mais ce peut être moins, pour certains fonctionnaires par exemple).
Le tarif du rachat
Pour celui qui régularise dans les dix ans suivant l’obtention de son diplôme, le montant pour le rachat s’élève à 1 560,60 € par année d’études (montant indexé, valable en octobre 2020).
Pour celui qui procède au rachat après 10 ans, la cotisation est plus élevée. Elle est le résultat d’un calcul compliqué sur base d’un coefficient déterminé, où interviennent des tables de mortalité et un taux d’intérêt. Plus longtemps vous attendez, plus le prix du rachat est élevé. Il peut aller jusqu’à quelque 6000 €.
C’est vous-même qui décidez du nombre d’années que vous souhaitez “régulariser” ainsi, mais vous ne pouvez pas racheter plus d’années que celles nécessaires pour obtenir le diplôme de l’enseignement supérieur.
Si vous avez une carrière mixte, vous ne pouvez pas choisir le système dans lequel vous allez régulariser : le rachat vaut nécessairement pour le système dans lequel vous travaillez au moment de votre demande.
Il est important que le nombre d’années qui seront finalement prises en compte pour le calcul de votre pension ne dépasse jamais ce qui est considéré comme une carrière complète. En effet, le rachat d’années d’études pour dépasser une carrière complète ne rapporte pas un cent.
Le régime transitoire
Un régime transitoire est d’application jusqu’au 30/11/2020. Il permet à ceux qui ont terminé leurs études depuis plus de dix ans de racheter des années d’études à 1 560,60€ par année d’études.
Attention : pour les salariés et les indépendants, ce tarif favorable ne vaut que pour les années d’études effectuées après leur 20e anniversaire. Pour le rachat des années précédentes, c’est le tarif normal qui est d’application.
Fonctionnaires : un cas à part
Pour les fonctionnaires, les années d’études comptaient naguère dans le calcul de leur pension. Ce qu’on appelait la bonification gratuite valait pour le diplôme requis pour la fonction qu’ils exerçaient.
Désormais, les fonctionnaires doivent eux aussi payer leur régularisation. Jusqu’à fin novembre 2019, ils bénéficiaient quand même d’une réduction de 15 %. Mais aujourd’hui, et jusqu’à fin novembre 2020, le tarif est de 1 560,60 €.
Mais les fonctionnaires n’en restent pas moins un cas à part. Il se peut encore toujours fort bien que le rachat ne leur soit pas nécessaire, ou alors dans une faible mesure seulement. En effet, la bonification gratuite reste totalement d’application pour les fonctionnaires qui, au 1/12/2018 au plus tard, répondaient aux conditions pour réclamer leur pension anticipée ou qui, au 1/12/2017, se trouvaient déjà dans le système de mise en disponibilité à temps plein ou à temps partiel préalable à la pension (ou qui répondaient aux conditions pour pouvoir bénéficier de ce système). Pour tous les autres, la bonification gratuite continue à compter partiellement, au prorata de leurs années de carrière par rapport à ce qui est considéré comme une carrière complète pour leur fonction au 01/12/2017.
Combien allez-vous y gagner ?
Un tel rachat reste un pari sur l’avenir. Pour décider si le moment est venu d’y procéder, plusieurs éléments importants sont à considérer.
Ce qui vous intéresse avant tout, c’est le montant que cela vous rapportera effectivement.
Le montant du supplément de pension supplémentaire qui vous sera officiellement versé est fixe:
• Dans le régime des salariés et des indépendants, un an de régularisation rapporte à ce jour 271,76 € brut sur base annuelle (22,65€ par mois) au taux d’isolé, et 339,70 € si votre pension est calculée au taux de ménage (28,78 € par mois). Ces montants sont également indexés.
• Dans le régime des fonctionnaires, le montant n'est pas fixe. Plus le salaire servant de base au calcul de votre pension est élevé, plus la régularisation rapporte. Si vous êtes né avant 1962, c’est le salaire de vos 5 dernières années de carrière qui compte et, pour les plus jeunes, c’est le salaire des 10 dernières années.
Mais comme, en faisant des calculs, nous avons constaté que certaines personnes risquaient de ne rien y gagner, ou presque, mieux vaut ne pas vous précipiter tête baissée.
Toutefois, nous pouvons vous aider. Si vous êtes membre de Test Achats, nous sommes à votre disposition pour un calcul personnel.
Surtout, n’oubliez pas de déclarer le montant du rachat sur votre déclaration d’impôt de l’année suivante. Nous expliquons plus loin où vous devez le déclarer.
Les rubriques qui suivent vous donnent toutes les explications.
Nous y expliquons également comment introduire votre demande de rachat.
Racheter des années d’études n’est pas très compliqué. Nous vous expliquons d’abord comment procéder. Puis nous vous donnons des conseils sur la manière dont vous pouvez fiscalement déduire le rachat et comment faire une simulation pour voir ce qu’il vous rapportera.
Comment demander le rachat ?
Vous pouvez demander le rachat en ligne via MyPension.be ou sur papier, auprès du Service fédéral des Pensions. La demande doit être introduite avant votre départ à la pension. Il faut y joindre une copie du diplôme ou de l’attestation délivrée à la fin de vos études.
Cette demande ne vous engage à rien. Vous ne devrez décider si vous allez ou non racheter vos années d’études qu’une fois en possession de toutes les informations adressées par le Service fédéral des Pensions.
Un peu plus tard (en janvier 2020, cela prenait environ un mois), le Service fédéral des Pensions vous communiquera ce qui suit :
- le nombre maximum d’années d’études que vous pouvez racheter ;
- le montant à payer par année rachetée. Ce montant varie selon qu’il s’agit d’années d’études avant ou après votre 20e anniversaire. C’est le moment de la demande qui détermine si vous pouvez bénéficier du tarif favorable de la période transitoire, et non la date du paiement du rachat.
- le montant brut de votre supplément de pension en base annuelle au tarif de personne isolée.
A ce moment, vous disposez d’un délai de 4 mois pour décider si vous voulez effectivement profiter de cette possibilité et, si oui, du nombre d’années que vous souhaitez racheter.
Une fois informé(e) du nombre d’années que vous voulez racheter, le Service fédéral des Pensions vous confirmera la décision définitive et le montant à payer.
A partir de ce moment, vous disposez de 6 mois pour effectuer le paiement. Ce paiement ne peut pas être échelonné. Il doit être fait en une seule fois. Mais vous n’êtes pas obligé de racheter la totalité des années en une fois. Vous pouvez faire deux régularisations, et étaler ainsi la charge financière sur plusieurs années.
Si, finalement, vous décidez de ne pas payer, la demande devient caduque.
Pensez à la déduction fiscale
Si l’on paie des impôts, la charge financière réelle du rachat sera en fait inférieure au montant payé pour ce rachat. En effet, la régularisation peut être déduite de vos revenus professionnels sur votre déclaration d’impôt, et le montant imposé sera donc moindre. Vous pouvez ainsi récupérer jusqu’à plus de la moitié du montant payé.
Pour cela, vous devez inscrire le montant du rachat dans votre déclaration d’impôt à la rubrique “cotisations sociales personnelles non retenues”. C’est-à-dire :
- pour un salarié ou un fonctionnaire : au cadre IV, code 1257/2257;
- pour un indépendant : le code et le cadre précis dépendent de votre situation fiscale ;
- pour un pensionné : au cadre V, code 1223/2223.
Faites une simulation sur MyPension
Comme on l’a dit, le Service fédéral des Pensions ne donne que le montant brut de ce que rapportera le rachat. Mais, pour vous, ce qui compte, c’est ce que vous y gagnerez réellement. Le net, donc.
Vous pouvez vous en faire une idée sur le site internet mypension.be.
Il suffit pour cela d’indiquer en quelle année vous avez achevé vos études, et combien d’années elles ont duré. Après quoi, vous pourrez comparer la pension à laquelle vous avez normalement droit et le supplément en brut et en net que vous rapporterait le rachat.
Mais, malheureusement, le résultat sur MyPension n’est pas l’évangile pour tout le monde.
Les limites d’une simulation sur MyPension
Si, dans la simulation sur MyPension, vous renseignez cinq années d’études, vous obtiendrez le résultat pour le rachat de cinq années. Tenez compte du fait qu’y figurent souvent des années avant votre 20e anniversaire et que, sauf pour les fonctionnaires, le rachat de ces années est souvent bien plus cher. Mais rien ne vous oblige à acheter toutes ces cinq années. Pour connaître l’impact du rachat d’un moins grand nombre d’années, il faut procéder autrement et indiquer que vos études n'ont duré que, par exemple une année si vous ne voulez connaître l’impact du rachat de la seule dernière année d’étude. Ou deux années si vous voulez connaître ml’impact du rachat des deux dernières années.
Le calcul ne vaut que si vous toucherez plus tard une pension au tarif “isolé”. C’est le cas de la plupart des partenaires d’un ménage à deux revenus. L’augmentation d’une pension au tarif ménage sera sensiblement plus importante.
MyPension vous donne le coût du rachat. Mais il s’agit d’un montant brut. Dès lors, vous devez d’abord en déduire l’avantage fiscal pour déterminer combien d’années il vous faudra pour récupérer votre investissement. Voyez le point précédent à ce propos.
Le calcul par MyPension du montant net de ce que vous rapportera le rachat ne vaut pas pour tout le monde. A cause de la cotisation de solidarité sur les pensions et du calcul de l’impôt suivant votre déclaration annuelle, il se peut fort bien que vous touchiez moins ou, au contraire, plus en net.
Parce que, d’abord, le précompte professionnel retenu pour passer du brut au net n’est pas calculé exactement sur le montant de votre pension. En effet, ce précompte est calculé par tranches de 15 €. Pour de petits montants comme les suppléments que rapporte le rachat d’une année, l’impact de cet arrondi peut être important. Mais cette retenue n’est pas définitive, ce n’est qu’un acompte, et le chiffre définitif viendra plus tard. Plus vous rachetez d’années, plus la marge d’erreur est réduite.
Parce que, ensuite, le montant net ne sera plus valable si vous touchez le capital d’une assurance groupe ou d’un fonds de pension. Ce capital peut en effet influencer la cotisation de solidarité qui sera déduite de votre pension.
Parce que, enfin, la ponction du fisc sera plus importante si, outre votre pension, vous avez encore d’autres revenus imposables, comme ceux d’une seconde résidence ou d’un travail d’appoint.
En outre, pour certains montants de pension brute, vous risquez que le rachat ne vous rapporte aucun supplément de pension, ou pas grand chose, du fait des anomalies dans le mode actuel de calcul des cotisations INAMI et de solidarité.
Pour les veuves/veufs
Nous conseillons aux veuves/veufs bénéficiant d’une pension de survie sur base de la carrière professionnelle de leur partenaire de s’informer auprès du Service fédéral des Pensions de l’impact du rachat sur cette pension de survie. Il n’a évidemment aucun sens de payer un supplément pour gagner 45 € sur sa pension personnelle si c’est pour perdre la même somme sur sa pension de survie. Or, ce sera souvent le cas en pratique.
Conclusion
Demandez la régularisation avant le 30/11/2020, même si vous n’êtes pas certain d’y gagner quelque chose. Car vous n’avez que jusqu’à cette date pour pouvoir bénéficier du tarif avantageux actuellement fixé à 1 560,60 € par année d’études.
Si, par la suite, vous décidez effectivement de racheter des années d’études, mieux vaut, pour des raisons fiscales, payer ce rachat une année où vous avez encore travaillé la majeure partie du temps. En effet, la cotisation de régularisation pourra alors être déduite de votre salaire, ce qui rapportera plus que si elle était déduite de votre pension (parce que le montant est moins élevé, et donc moins lourdement taxé).
Pour la plupart des fonctionnaires qui prendront leur retraite dans un avenir prévisible, le rachat ne sera pas intéressant car (quasi) toutes leurs années d'études compteront de toute façon dans le calcul de la pension.
Vous souhaitez peut-être connaître exactement ce qu’il en est dans votre cas ? Si vous êtes membre de Test Achats, nous vous y aiderons bien volontiers. Pour autant du moins que vous n’ayez que des revenus belges.
Plus précisément, voici ce que nous pouvons calculer pour vous :
1. combien d’impôt vous épargnerez en déclarant le montant du rachat dans votre déclaration fiscale;
2. quel supplément net de pension vous allez toucher ;
3. après combien d’année, une fois pensionné, vous aurez récupéré la somme nette investie dans le rachat, ainsi que le rendement que cela vous procure si vous vivez jusqu’à 75, 80 et 85 ans.
Ces calculs sont basés sur les règles fiscales et de cotisations sociales d’application sur les revenus de 2020.
La réponse devrait vous parvenir endéans deux à trois semaines.
Il vous suffit de prendre contact en ligne avec nos experts fiscaux.
Sur la première page du formulaire de réponse, choisissez comme raison : “Question ou souhait d’une intervention de Test Achats” et comme thème : “Impôts”.
Sur la seconde page, vous pouvez charger les documents vous permettant de nous communiquer les données suivantes:
- vos données fiscales. Si vos revenus imposables dépassent 50 000 €, il suffit de le préciser, nous n’avons pas besoin d’en savoir plus. Sinon, adressez-nous une copie de votre dernière déclaration ou de votre dernier avertissement-extrait de rôle si votre situation de revenus personnelle n’a pas beaucoup changé par rapport à 2018. S’il y a eu du changement, expliquez la nouvelle situation et précisez les montants imposables. Si vous êtes devenu propriétaire de biens immobiliers qui ne figurent pas sur les documents fiscaux en notre possession, renseignez-en le revenu cadastral ;
- le nombre d’années que vous souhaitez racheter à 1 560,60 €. Si vous souhaitez également racheter des années à un tarif plus élevé, signalez également ce tarif ;
- le montant de votre pension brute dans l’hypothèse où vous ne rachèteriez pas d’années d’études (vous pouvez le trouver sur MyPension.be) ;
- pour les fonctionnaires : le montant brut de l’augmentation de votre pension selon le Service fédéral des Pensions ;
- le montant brut du capital que vous toucherez d’une assurance-groupe ou d’un fonds de pension au titre de pension complémentaire ;
- le revenu imposable dont vous disposerez en plus de votre pension légale une fois pensionné. S’il s’agit de revenus immobiliers, signalez le total des revenus cadastraux. Ceci est superflu si vous nous envoyez votre dernière déclaration d’impôt ou votre dernier avertissement-extrait de rôle. Mais vous pouvez également avoir des revenus imposables provenant d’un travail d’appoint. Dans ce cas, signalez le montant net que cela rapportera.
Si vous avez déjà obtenu une réponse du Service fédéral des Pensions, il est bon de joindre ce document.
Nous jugeons inadmissible qu’un consommateur risque de tirer des conclusions erronées des informations qu’il reçoit du Service fédéral des Pensions relativement à l’impact de sa régularisation. En effet, il faudrait être un expert en matière de cotisations sociales et d’impôts pour savoir ce que rapporte effectivement le rachat, ce qui est hors de portée du consommateur lambda.
Pour nous, un euro supplémentaire de pension brute doit toujours signifier une pension nette plus élevée. Le bénéfice de la régularisation ne peut pas non plus être moins élevé pour une pension modeste que pour une pension plus importante. En outre, le supplément de pension obtenu grâce au rachat des années d’études en vigueur actuellement doit être maintenu, même si le calcul de la pension est revu dans le futur. Le citoyen doit absolument avoir la certitude que, lorsque la régularisation semble intéressante à un moment donné, elle le reste.
Nous avons interpellé les ministres des Pensions, des Affaires sociales et des Finances à ce sujet en 2018 déjà. A l’époque, il nous a été répondu qu’une solution était recherchée; mais jusqu’à présent, cela n’a débouché sur aucune mesure concrète.