Besoin criant de plus de moyens pour les soins de santé psychique

Dans le cadre de la crise du corona, les psychologues et les psychiatres s’attendent à une vague de demandes de soins qui ne manquera pas de déferler. Notre pays y est-il suffisamment préparé ?
"Mentalement sage", un groupe de réflexion plaidant en faveur de soins de santé psychique performants (au sein duquel nous représentons le consommateur) craint que non. Avant la crise du corona, les temps d’attente pour les soins de santé psychique (SSP) étaient déjà longs. A défaut d’intervenir maintenant, ils le seront encore plus.
Comment doivent intervenir les pouvoirs publics ? C’est le sujet d’une première audition que tiendra demain, mardi 12 mai, la Commission Santé Publique et Egalité des Chances à la demande de "Mentalement Sage". Différents experts discuteront de la situation des SSP, ainsi que des possibilités pour l’avenir (proche).
Une deuxième audition est programmée le 19 mai. Nous la suivrons sur place au Parlement. Aux côtés de "Mentalement Sage", nous plaidons en faveur d’un budget d’urgence permettant de parer aux besoins les plus urgents. A long terme aussi, les pouvoirs publics doivent prévoir suffisamment de centres.
Là où le bât blesse...
Des soins abordables et accessibles. Ceux-ci devraient être à la portée de chaque consommateur. Cela vaut aussi naturellement pour les soins de santé psychique.
Hélas, les SSP ne sont pas aussi accessibles actuellement que nous le souhaiterions. Et cela posait déjà problème avant la crise du corona.
Par le passé, nous avons déjà constaté à maintes reprises dans nos enquêtes que l'argent est une pierre d'achoppement qui empêche les personnes de demander de l’aide (cf. par ex. “Dépression et Anxiété. trouvez de l’aide” dans TS142). Cela pose toujours problème.
Avec le remboursement des consultations chez un psychologue conventionné, la Ministre De Block a fait un pas dans la bonne direction. Cependant, ce règlement demeure très limité et n’est pas bien connu. Nombreux sont ceux qui n’entrent pas en ligne de compte. Ce projet est un puzzle dans une offre de soins SSP extrêmement complexe dans notre pays. Même les prestataires de soins et les décideurs politiques ignorent tout ce qui est disponible, constate le KCE.
Autre pierre d’achoppement : les temps d’attente dans ce secteur. Selon les Etats-Généraux des Soins de Santé Psychique, le temps d’attente pour pouvoir bénéficier de soins adaptés est en moyenne de trois mois (!). Certains enfants doivent même patienter plus d’un an pour recevoir un diagnostic.
Autre élément de taille : la stigmatisation qui colle encore et toujours aux problèmes psychiques. Cela aussi a déjà été mis en lumière par le passé dans nos enquêtes et est toujours d’actualité. Les gens qui, suite à la crise du corona, souffrent d’anxiété ou d’autres troubles psychiques vont-ils oser demander de l’aide ? Peut-être devrait-on sensibiliser davantage sur ce plan.
Plus d’1 milliard d’euros supplémentaires requis
Personne ne s’étonnera du fait que les SSP sont perfectibles. Ce secteur est sous-financé depuis bien longtemps.
Dans notre pays, 6% seulement des dépenses en matière de soins de santé vont aux SSP. Selon l’OCDE (Organisation pour de Collaboration et de Développement Economiques), ce chiffre devrait être de 10% minimum. Ce qui revient à plus de 1 milliard d’euros supplémentaires requis.
Le gouvernement fédéral a pris des mesures pour guider au mieux les entreprises au travers de cette crise. Le moment est à présent venu de prévoir des moyens supplémentaires pour les SSP et d’élaborer un plan visant à gérer de la manière la plus efficace possible les moyens disponibles. C’est important pour la santé publique, mais aussi pour l’économie. Nous savons entre-temps que la souffrance psychique augmente l’absentéisme, mine la productivité et débouche sur des frais médicaux en augmentation ( cf. Davantage de moyens pour l’aide psychologique s.v.p).
Selon nous, un remboursement plus étendu des psychologues cliniques et autres métiers de la santé psychique devrait aller de pair avec la formation requise et une accréditation. Car dans cette discussion, nous ne devons pas perdre de vue la qualité des soins.