Clauses de révision des prix dans les contrats de construction : comprendre et se protéger

Clauses de révision des prix dans les contrats de construction : de quoi s’agit-il ?
Du devis au contrat de construction
Une fois que vous avez une idée claire, et éventuellement un plan, des travaux que vous souhaitez faire réaliser, vous pouvez demander un devis à un entrepreneur. Ce devis devient un contrat contraignant dès que le client ou le maître d’ouvrage l'accepte.
Sur les devis figure en général une période de validité, par exemple 1 mois. En fait, cette durée peut être mentionnée soit dans le devis proprement dit, soit dans les conditions générales. Elle peut être plus courte en période de forte hausse des prix.
Il faut un accord sur le prix pour que puisse se conclure un contrat. En principe, le prix est donc fixe. Un supplément de prix ne peut être facturé que dans le cas de travaux supplémentaires ou de modifications par rapport à l'offre ou au contrat. En pratique, le consommateur a généralement tout intérêt à s'assurer du prix dès la conclusion du contrat.
Quelles informations de prix doivent être reprises dans le contrat?
Le fait que le contrat doit spécifier le prix ne signifie pas nécessairement qu'il doit faire mention d’un montant en euros. Il suffit que le prix soit déterminable, par des critères objectifs qui servent au calcul du prix. Le mode de calcul du prix final doit donc être clair pour le client. L’entrepreneur ne peut pas le déterminer unilatéralement.
Quelles sont les implications d’une clause de révision des prix?
La règle selon laquelle il suffit que le prix soit déterminable laisse la porte ouverte aux clauses de révision des prix. Or, en période de forte augmentation des prix comme celle que nous traversons actuellement, les entrepreneurs ont de plus en plus tendance à inclure une clause autorisant l’une ou l’autre forme de révision de prix. Mais la révisibilité des prix doit aller dans les deux sens. Autrement dit, une révision de prix peut entraîner tant une hausse qu’une baisse, en fonction des circonstances.
La possibilité d'ajuster le prix initial en fonction des prix des matériaux et du coût de la main d’œuvre se retrouve assez fréquemment dans les contrats. Il s'agit alors d'appliquer un coefficient de correction qui découle d'un indice prédéterminé, tel que la "Mercuriale" (officiellement "Indice I 2021") et les barèmes salariaux fixés par le gouvernement.
Les formules appliquées peuvent sembler complexes. Mais que cela ne vous décourage pas : vous allez découvrir ci-dessous ce que signifie exactement chaque partie de ces formules.
Voici un exemple chiffré où le prix convenu est de 15000€, mais après application de la formule de révision de prix, le nouveau prix est de 15195€:
Quelles sont les lois applicables aux clauses de révision des prix?
Quand une clause de révision de prix est-elle légale et quand ne l'est-elle pas?
Les consommateurs bénéficient d'une certaine protection juridique. En plus du principe général que nous avons déjà évoqué, à savoir que le prix modifié doit être suffisamment prévisible et déterminable, d'autres règles s'appliquent. Elles remontent à 1976, une période qui a également connu une forte inflation.
Ainsi, une clause de révision des prix ne peut s'appliquer qu'à un maximum de 80% du prix final. Autrement dit, 20% au moins du prix final doit être fixe. En outre, les paramètres utilisés pour réviser le prix doivent correspondre à des coûts réels, dont les prix des matières premières, les barèmes salariaux et les frais de transport.
Troisièmement, chaque paramètre ne peut s’appliquer qu'à la partie du prix relative aux coûts qu'il représente. En d'autres termes, le paramètre relatif aux frais de transport ne peut être appliqué qu'à la partie du prix qui porte sur ces frais.
Toute clause prévoyant une révision des prix basée sur un paramètre ou un indice général, comme l'indice des prix à la consommation ou l'inflation, est interdite.
Dans le cas d'une clause de prix, prêtez attention aux moments retenus pour déterminer le prix. Le point de départ sera en toute logique le moment de la signature du contrat. Mais le point de comparaison ultérieur pourra différer. Dans notre contrat type, par exemple, nous utilisons comme point de départ les prix à la date de la signature du contrat (ou l'indice des matériaux du mois civil où le contrat a été conclu) et, comme point de comparaison, le prix au moment du commencement des travaux.
D'autres contrats prévoient parfois des moments différents, par exemple le prix ou l'indice du mois précédant la fin des travaux voire le prix ou l'indice à la date de la facturation finale. Il va sans dire que ça peut représenter une belle différence dans la pratique. Si les travaux prennent du retard en raison d'une erreur de l'entrepreneur et s’il y a une hausse de prix pendant cette période, la révision des prix ne pourra pas être appliquée.
De toute évidence, les clauses de révision des prix ne peuvent jouer que si le consommateur a eu connaissance de la clause avant la conclusion du contrat et l'a acceptée. Ainsi, une clause incluse dans les conditions générales ne peut être opposée qu'au consommateur qui connaissait et a accepté les conditions générales au moment de la conclusion du contrat.
Les clauses contraires aux règles énoncées ci-dessus sont nulles et non avenues. Bref, elles n’ont aucune valeur juridique.
Pouvez-vous refuser une clause de révision des prix ?
Vous pouvez décider, en tant que consommateur, de refuser une clause de révision des prix qui vous est proposée, mais l'entrepreneur n'est pas obligé d'accepter votre refus. Dans tous les cas, le mieux est d’en discuter avec lui. Si un architecte est impliqué dans les travaux, il pourra également intervenir dans la concertation.
Les mêmes lois s'appliquent-elles à l'étranger ?
Les règles ci-dessus relatives aux clauses de révision des prix ne s'appliquent qu'aux contrats belges. Un contrat avec un entrepreneur étranger sera soumis à ces règles s’il concerne des travaux à exécuter en Belgique et a été conclu par des personnes résidant en Belgique.
Exemples de formulations non légales dans les clauses de révision des prix
Les prix peuvent-ils changer s’il n’y a pas de clause de révision des prix dans le contrat?
En principe, le prix ne peut plus changer si le contrat ne contient pas de clause de révision des prix. Un contrat, en effet, a force contraignante. Toutefois, une modification récente du code civil change quelque peu la donne…
De nouvelles règles ont été adoptées en 2022 pour les contrats conclus à partir du 1/1/2023. En jargon juridique, on parle de l'introduction de la théorie de l'imprévision. Qu’est-ce que cela veut dire en clair ? Dans certains cas, une des parties au contrat peut demander une renégociation des conditions, notamment si un changement de circonstances imprévu rend l'exécution du contrat excessivement onéreuse pour cette partie, par exemple en raison d'une augmentation significative des coûts.
Si la renégociation n'aboutit pas, la partie lésée peut saisir le tribunal et demander la modification du contrat, voire sa résiliation (totale ou partielle).
Le contrat peut exclure la possibilité de le modifier. Reste à voir ce que ces nouvelles règles signifieront dans la pratique et comment elles seront appliquées. Il existe par exemple une condition selon laquelle le changement de circonstances devait être imprévisible au moment de la signature du contrat.
En ce qui concerne les contrats de construction conclus en cette période, il semble difficile de pouvoir affirmer que l'augmentation des prix de revient était imprévisible. La question se pose aussi de savoir à partir de quand une augmentation de prix devient excessivement onéreuse.
La clause de révision des prix peut-elle s'appliquer à un projet clé en main?
La loi Breyne définit les règles applicables à un projet de logement sur plan ou clé en main. Et si un projet de construction relève de cette loi Breyne, les règles deviennent encore plus strictes. En principe, le prix est fixe. Il ne peut encore changer que si le contrat contient une clause de révision des prix. Pour les projets de construction couverts par la loi Breyne, une distinction doit être faite entre le prix du terrain et le prix des travaux en cas de révision des prix.
La partie du prix relative au terrain ne peut jamais faire l'objet d'une révision de prix. D'ailleurs, pour ce type de projets aussi, la révision des prix ne peut concerner que 80% du prix initial. Les paramètres qui peuvent entrer en ligne de compte sont les fluctuations des coûts de la main-d'œuvre et des prix des matériaux. La révision des coûts de la main-d'œuvre ne peut porter que sur un maximum de 50% du prix des travaux. Pour les coûts des matériaux, seuls 30% du prix peut être révisés. Au moins 20% du prix restera donc toujours fixe.
Conseils de notre expert
1. Réfléchissez au préalable si une clause de révision des prix est ou non acceptable pour vous.
2. Lisez attentivement les conditions générales avant de signer et assurez-vous de bien comprendre les implications financières qu'elles peuvent avoir.
3. Tenez compte de la marge de manœuvre financière dont vous disposez. Avez-vous la possibilité d'emprunter davantage et, si oui, à quelles conditions.
4. N'acceptez que les clauses de révision des prix basées sur des données objectives.
5. Si l'entrepreneur applique la clause de révision des prix, vérifiez attentivement le calcul et, au besoin, faites-le vérifier par votre architecte.
6. Demandez un prix fixe garanti pendant une certaine période - par exemple, un an - de sorte que la clause de révision des prix ne puisse s’appliquer qu'après ce délai.
7. Essayez de vous mettre d'accord sur un montant maximum.
8. N'oubliez pas qu'une clause de révision des prix peut fonctionner dans les deux sens ; une réduction de prix en votre faveur est donc également possible.
9. Les clauses de révision des prix qui ne remplissent pas les conditions exposées ci-dessus n'ont aucune valeur juridique.