Dossier

Les conséquences fiscales du mariage et de la cohabitation en Belgique

08 décembre 2023
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08 décembre 2023

Quelles sont les différences entre le mariage, la cohabitation légale et la cohabitation de fait au niveau fiscal ? Découvrez les avantages, inconvénients, contraintes et spécificités propres à chaque forme de cohabitation en Belgique, et des différences qui existent entre les Régions.

Mariage, cohabitation légale ou de fait, quelles différences?

Lorsque vous emménagez avec votre partenaire, plusieurs régimes existent. La forme la plus adaptée va dépendre de la situation de chacun, mais aussi de vos projets de vie. Vous disposez de trois options.

La cohabitation de fait

Généralement, les couples qui emménagent sous le même toit démarrent sous le régime de la cohabitation de fait. Il n'y a donc pas d'officialisation légale de l'union. Si vous ne disposez pas d'un patrimoine commun et n'avez pas d'enfant, cette cohabitation n'apporte pas de grande modification sur le plan juridique et fiscal.

La cohabitation légale

Plus contraignante, cette forme officialise l'union aux yeux de la loi. Les cohabitants légaux sont en effet assimilés à bien des égards à un couple marié selon le régime de séparation des biens (voir ci-dessous).

Le mariage

Enfin, la troisième catégorie concerne les personnes mariées, qui peuvent choisir entre différents régimes, comme le régime légal ou le régime de la séparation des biens. Le mariage offre une meilleure protection sur le plan juridique, mais des différences existent entre les formes susmentionnées.

Quelle forme de cohabitation choisir ?

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Les conséquences fiscales du mariage

Au final, quelle forme de cohabitation est préférable et quelles sont les différences fiscales si vous décidez de vous marier ? "Des efforts ont déjà été réalisés au niveau fédéral et régional pour atteindre une neutralité fiscale entre les différentes formes de cohabitation", précise Geert De Witte, expert juridique chez Testachats.

Mais ces efforts sont-ils suffisants ? "En ce qui concerne l'impôt sur le revenu des personnes physiques, une mise à niveau entre les personnes mariées et les cohabitants légaux a été réalisée depuis 2004. Cependant, aucune réglementation fiscale n'est prévue pour les cohabitants de fait. Ils sont donc soumis aux mêmes règles fiscales que les personnes célibataires", indique-t-il. Ils doivent donc remplir une déclaration fiscale individuelle, comme s'ils étaient célibataires, et sont imposés comme tels. Une situation qui peut donc être la source d'inégalités selon la forme de cohabitation choisie.

Tour d'horizon des différents volets concernés avec notre expert juridique.

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Déclaration fiscale et exonération

L'année de votre mariage ou du début de votre cohabitation légale, rien ne change au niveau de la déclaration fiscale. "L'administration fiscale vous considère toujours comme célibataire au niveau fiscal. Vous devez donc encore chacun remplir une déclaration fiscale distincte concernant vos revenus de cette année", confirme Geert De Witte. Ce n'est qu'à compter de l'année suivante que vous devrez remplir une déclaration fiscale commune.

Quant aux cohabitants de fait, ils restent systématiquement considérés comme fiscalement célibataires, et doivent donc remplir une déclaration fiscale distincte.

Exonération fiscale identique pour tout le monde

En matière d'exonération fiscale, ce à quoi chaque contribuable a droit, il n'y a désormais plus de différence entre les différents régimes.

Jusqu'à l'année des revenus 2004, l'exonération était plus faible pour les personnes mariées. Désormais, l'administration ne fait plus de différence entre les célibataires, les cohabitants de fait, les cohabitants légaux et les personnes mariées. "En 2023, l'exonération fiscale s'élève à 10 160 € pour chaque contribuable : il n'y a donc plus de différence à ce niveau, peu importe la forme de cohabitation", confirme notre expert.

La seule variable concerne les enfants à charge.

 
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Des différences pour les enfants à charge

L'exonération fiscale pour les enfants à charge est identique pour tous les régimes, que vous soyez mariées, cohabitants légaux, cohabitants de fait ou célibataire. Elle est de 1 850 € pour un enfant, 4 760 € pour deux enfants, 10 660 € pour trois enfants, 17 250 € pour 4 enfants, etc.

"Toutefois, étant donné que les cohabitants de fait sont imposés comme des célibataires, ils ont droit à une exonération fiscale supplémentaire de 1 850 €. Cela représente une économie annuelle d'environ 550 €. Les cohabitants de fait ont donc un avantage fiscal annuel plus élevé pour leurs enfants à charge", glisse Geert De Witte.

Enfants gagnant un revenu supplémentaire

Et en ce qui concerne les enfants à charge qui déclarent toutefois un revenu ? Le montant autorisé pour rester fiscalement à charge ne sera pas le même pour tout le monde.

Pour les cohabitants de fait, les enfants peuvent avoir des revenus nets jusqu'à 5 520 €/an sans pour autant perdre leur statut d'enfant à charge. Pour les personnes mariées et les cohabitants légaux, ce montant n'est que de 3 820 €/an. Si les revenus de l'enfant dépassent ce montant, il n'est plus considéré comme étant à charge.

"Concrètement, un enfant de cohabitants de fait peut gagner un revenu imposable brut de 10 090 € en tant qu'étudiant travailleur, tout en conservant son statut d'enfant à charge, si aucune pension alimentaire n'est versée. Un enfant de personnes mariées ou de cohabitants légaux ne pourra pas gagner plus de 7 965 € de revenu brut imposable", détaille-t-il.

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Déclarer ses revenus professionnels quand on est marié

À ce niveau, il existe bien quelques différences.

Le quotient conjugal

Si l'un des deux partenaires ne possède que peu ou pas de revenus professionnels, il est préférable sur le plan fiscal d'être mariés ou cohabitants légaux.

On vous explique.

"Chez les personnes mariées et les cohabitants légaux, l'administration fiscale transfère de manière fictive une partie du revenu du partenaire le mieux rémunéré vers l'autre partenaire, si celui-ci ne possède que peu ou pas de revenus professionnels. De cette manière, cette partie de revenu n'est pas imposée au taux le plus élevé, soit le taux du partenaire le mieux rémunéré, mais à un taux inférieur applicable à l'autre partenaire. Elle est donc in fine beaucoup moins imposée, puisque calculée sur la base du taux inférieur appliqué à l'autre partenaire", reprend Geert De Witte.

C'est ce qu'on appelle le quotient conjugal. Malgré son nom, il s'applique également aux cohabitants légaux. Il est d'application lorsque les revenus professionnels de l'un des partenaires sont inférieurs à 12 550 €, et inférieurs à 30 % du montant total des revenus professionnels des deux partenaires. Une partie du revenu du partenaire le mieux rémunéré est ainsi transférée jusqu'à ce que les limites mentionnées soient atteintes.

Besoin d'un exemple ?

Prenons un couple sans enfant. L'un des partenaires déclare 60 000 € de revenus professionnels, et l'autre partenaire n'a pas de revenus professionnels. S'il s'agit de personnes mariées ou de cohabitants légaux, grâce au quotient conjugal, ils pourront économiser pas moins de 5 677 € d'impôts par rapport à des cohabitants de fait dans la même situation. "Les familles à revenu unique sont donc mieux loties lorsque les partenaires sont mariés ou cohabitent légalement", glisse-t-il encore.

Attention toutefois : comme pour la déclaration fiscale commune, le quotient conjugal n'est pas d'application l'année du mariage ou du début de la cohabitation légale. Un autre avantage est d'application si l'un des partenaires n'avait pas plus de 3 490 € de ressources nettes au cours de l'année du mariage ou de la cohabitation légale. La somme exempte d'impôt du second partenaire est rehaussée de 1 850 €, soit un avantage net d'environ 530 €.

Et si l'un des partenaires travaille à l'étranger ?

Les travailleurs frontaliers sont nombreux en Belgique. Plus de 80 000 Belges travaillent dans les pays voisins (Luxembourg, France, Allemagne, Pays-Bas). Qu'en est-il des conséquences au niveau fiscal, selon la forme de cohabitation, lorsqu'un membre du couple travaille à l'étranger ?

Jusqu'il y a peu, un couple marié ou légalement cohabitant avec enfants à charge, dont le partenaire le mieux rémunéré travaillait à l'étranger, était fiscalement nettement désavantagé par rapport aux cohabitants de fait. "Dans le cas de personnes mariées ou cohabitants légaux, l'administration fiscale attribuait automatiquement l'exonération fiscale pour les enfants à charge au partenaire le mieux rémunéré. S'il s'agissait des revenus de la personne travaillant à l'étranger, et donc par définition exonérés en Belgique, l'exonération fiscale pour les enfants à charge ne procurait aucun avantage fiscal", rappelle Geert De Witte.

En revanche, si les partenaires étaient cohabitants de fait, ils bénéficiaient de l'avantage fiscal pour les enfants à charge. Il suffisait de déclarer les enfants dans la déclaration du partenaire travaillant uniquement des revenus belges.

"La Cour de justice de l'Union européenne a condamné la Belgique pour cette pratique. Testachats a également soulevé ce problème pendant de nombreuses années. L'État belge a cédé et a éliminé cette inégalité en ce qui concerne l'exonération fiscale pour les enfants à charge", informe-t-il, même si les personnes mariées et les cohabitants légaux restent fiscalement désavantagés à d'autres niveaux.

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Et pour les droits de succession?

La relation familiale joue un rôle important dans la détermination du taux en la matière. Par le passé, les taux les plus avantageux ne s'appliquaient qu'aux personnes mariées. Les droits de succession ayant été régionalisés, les trois Régions du pays pratiquent aujourd'hui des modalités et des taux différents.

  • La Flandre a égalisé les droits de succession entre les personnes mariées, les cohabitants légaux et les cohabitants de fait (depuis au moins 1 an). Il faut toutefois, dans le cadre des cohabitants de fait, pouvoir apporter la preuve d'une vie commune et d'une cohabitation ininterrompue d'au moins un an. La preuve peut être aisément apportée grâce à un extrait du registre de la population (inscription des deux cohabitants à la même adresse).
  • La Wallonie et Bruxelles ont uniquement égalisé les droits entre les personnes mariées et les cohabitants légaux. La Région wallonne est même plus exigeante encore que la Région bruxelloise, puisqu'elle exige une cohabitation légale de plus d'un an avant la donation ou l'ouverture de la succession.
  • Une nouveauté entre en vigueur en Région bruxelloise pour les successions à partir du 1er janvier 2024. Les cohabitants de fait qui totalise au moins une année de vie commune ininterrompue bénéficieront désormais du même tarif que les couples mariés et les cohabitants légaux. Pour bénéficier du tarif préférentiel des logements familiaux, il faudra attendre trois années de vie commune.

Quelques exemples chiffrés

L'un des partenaires hérite de 100 000 €. De quel montant devront s'acquitter les membres du couple selon leur régime et leur Région ?

  • En Flandre, les droits de succession s'élèveront à 6 000 € pour les cohabitants de fait (de plus d'un an), les cohabitants légaux et les personnes mariées.
  • À Bruxelles, les droits de succession s'élèveront à 5 500 € pour les cohabitants légaux et mariés, et à 50 000 € pour les cohabitants de fait.
  • En Wallonie, les droits de succession s'élèveront à 5 630 € pour les cohabitants légaux et mariés, et à 58 125 € pour les cohabitants de fait.

Les différences ne sont donc pas négligeables, puisque les cohabitants de fait en Wallonie et à Bruxelles devront payer près de 10 fois plus de droits de succession que les cohabitants légaux et mariés. Toutefois, comme expliqué ci-dessus, les cohabitants de fait à Bruxelles qui vivent ensemble depuis au moins 1 an pourront bénéficier du même tarif que les couples mariés et cohabitants légaux à partir du 1er janvier 2024.

L'égalisation entre mariés et cohabitants légaux concerne la tarification, mais le droit successoral légal. Les cohabitants légaux héritent donc différemment des personnes mariées, et les cohabitants de fait n'héritent pas automatiquement l'un de l'autre.

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