Comment testons-nous les crevettes ?


Nous avons concentré notre attention sur les crevettes grises et roses fraîches (pas de congelées), préemballées, et vendues en grandes surfaces. Un total de 34 échantillons ont été analysés, répartis en trois catégories : 17 échantillons de crevettes grises décortiquées, 14 échantillons de crevettes roses décortiquées et 3 échantillons de crevettes grises non décortiquées.
En laboratoire, nous avons vérifié leur qualité microbiologique, leur fraîcheur, la présence ou non d’additifs (conservateurs) et de contaminants, ainsi que l'authenticité (analyse pour vérifier s'il s'agit bien de la variété mentionnée sur l'étiquette) et l'étiquetage (origine, etc.). En parallèle, nous avons confié les mêmes échantillons à un panel d’experts pour qu’ils puissent en évaluer la texture, l'odeur et le goût.
Tous les produits étant préemballés, nous avons pu vérifier toutes les étiquettes.
Informations obligatoires
L’étiquette étant un élément marketing important puisqu’elle porte le nom de la marque, c’est le producteur qui décide de l’aspect qu’elle aura. Par contre, c’est la législation qui détermine les informations qui doivent obligatoirement y figurer. En Belgique, la législation à ce propos est basée sur les directives européennes.
Les indications obligatoires les plus importantes sont : la description du produit, le fait qu’il s’agit d’un produit pêché ou de culture, le pays de production, les ingrédients et additifs, le contenu, la date de durabilité minimale ou la date limite de consommation, les conditions de stockage, les coordonnées du producteur ainsi que la mention « décongelé » si le produit a déjà été congelé et ne peut plus l’être.
Toutes les étiquettes satisfont aux obligations légales.
Informations non obligatoires
Chez Test Achats, nous aimerions que d’autres éléments deviennent également obligatoires.
- La date de production ou d’emballage, qui est à la fois importante pour la durée de conservation, mais aussi pour la traçabilité du produit.
- Le calibre. Cette demande ne concerne que les crevettes roses dont les calibres peuvent varier. Aucun de nos échantillons ne le précisait, mais comme toutes les crevettes étaient préemballées dans des emballages transparents, le consommateur peut voir leur taille réelle.
Vérification du poids net
Nous avons vérifié, sur plusieurs échantillons de chaque produit, dans quelle mesure, le poids des crevettes égouttées correspondait bien à celui indiqué sur l’emballage. Légalement, cet écart de poids peut aller jusqu’à 4,5 %.
Tous les produits analysés contenaient un poids réel de crevettes dans les limites de cet écart légal.
Presque toutes les étiquettes mentionnent une liste plus ou moins longue d'additifs. En général, il s’agit de conservateurs destinés à maintenir les crevettes en bon état de fraîcheur entre le moment de la pêche et celui de la dégustation. Mais on peut également y retrouver des additifs influençant leur goût et leur couleur.
Voici à quoi servent les additifs les plus couramment utilisés que l’on retrouve en général sur ces produits.
Les conservateurs
Acide benzoïque (E210) et acide sorbique (E200)
Ces produits sont repris soit sous leur dénomination, soit sous leur code d’additif : E200 pour l’acide sorbique et E210 pour l’acide benzoïque. Des sels dérivés de ces substances sont également parfois utilisés comme le benzoate de sodium (E211) et le sorbate de potassium (E201).
Ces additifs sont autorisés dans certaines denrées alimentaires, comme les crevettes, mais dans une mesure limitée vu les réactions d’hypersensibilités qu’ils peuvent entraîner. Selon la législation, un maximum de 6g/kg d’acide benzoïque et/ou sorbique peut être utilisé pour les crevettes grises cuites et un maximum de 2 g/kg pour les crevettes roses cuites. La limite vaut donc bien pour les deux additifs ensemble.
Cette grande différence dans les limites autorisées pour les crevettes grises et les crevettes roses serait due au fait que la crevette grise est d’abord cuite sur le bateau de pêche puis décortiquée (avec tout ce que cela comporte comme risque de nouvelle contamination), alors que la crevette rose est d’abord décortiquée, puis cuite.
Cinq échantillons de crevettes grises dépassaient cette limite légale de 6 g/kg : Zeelandia Crevettes grises, Grijze Noordzeegarnalen (Golden Seafood Crevettes grises (Aldi), Sans marque Crevettes grises (Carrefour), Nautica Grijze Noordzeegarnalen (Lidl) et Heiploeg Crevettes grises.
Ces Produits ont bien entendu obtenu une mauvaise évaluation en raison de ce dépassement. Par ailleurs, nous avons informé l’AFSCA de ces infractions.
Aucun échantillon de crevettes roses ne dépassait les limites.
Sulfites
Le sulfite a une double application en tant qu'additif pour les crevettes. Primo, en tant que conservateur pour les crevettes décortiquées cuites. Secundo comme outil efficace, voire nécessaire, pour lutter contre la mélanose ou "tache noire" des crevettes crues non décortiquées.
Il s’agit du métabisulfite de sodium (E223), autorisé pour des raisons sanitaires pour tous les crustacés, mais de manière limitée en raison des réactions d’hypersensibilité qu’il peut déclencher : 50 mg/kg de chair pour les produits cuits et jusqu’à 150 mg/kg de chair pour les produits crus.
Nous n’en avons retrouvé dans aucun des échantillons de crevettes grises décortiquées, mais bien dans deux échantillons de crevettes grises non décortiquées et 3 de crevettes roses décortiquées. Chaque fois sous la limite légale.
Les résidus d’antibiotiques, de métaux lourds et de PCB
Les crevettes roses testées provenant de l’aquaculture, nous avons vérifié si elles contenaient des résidus d’antibiotiques (tétracyclines, quinolones, chloramphénicol, sulfonamides et beta lactam), de métaux lourds et de PCB.
Nous n’avons trouvé ni résidus d’antibiotique ni métaux lourds dans les échantillons. Pour 2020, le niveau de mercure dans les crevettes grises (pêchées dans le sud de la mer du Nord) variait de 0,0524ppm à 0,095ppm. La norme légale est de 0,5ppm.
Nous avons juste détecté de très faibles quantités de PCB.
Tous les échantillons ont été évalués par un panel d'experts professionnels, juste après l'achat, c'est-à-dire au moins 3 jours avant la date limite de consommation. Nous leur avons demandé de se prononcer sur leur odeur (25 % de la note finale), leur texture (25 %) et, bien sûr, leur goût (50 % de la note) en se basant sur un schéma de cotation reconnu pour l’évaluation des poissons et crustacés frais (Torry).
Un fumet épicé ou de mer (algue) donne sans conteste plus envie d’ouvrir la bouche qu’un relent d’ammoniaque ou de sueur intense. De la même façon, on préfère croquer une crevette bien ferme que grumeleuse ou molle. Quant au goût, si la saveur de vos crevettes est laiteuse et légèrement sucrée, c’est parfait.
Sur tous ces plans, les crevettes grises restent un cran au-dessus des crevettes roses. Deux produits ont même récolté tous les suffrages des experts : Zeelandia Crevettes grises et AH Hollandse garnalen (notre Meilleur du Test).
Par contre, dégustées à l’aveugle comme toutes les autres, les crevettes achetées non pelées n’ont pas séduit davantage que les autres au niveau du goût. Inutile donc de se donner la peine (fastidieuse) de les éplucher vous-même.
En précisant bien que ce test n’a concerné que des produits préemballés. Si vous vous fournissez chez un bon poissonnier, vous n’arriverez peut-être pas aux mêmes constatations.
Les crevettes étant des produits extrêmement périssables s’abîmant rapidement, la fraîcheur et la qualité bactériologique des produits mis en vente sont des paramètres importants.
Indole
On peut la mesure en recherchant la teneur en indole, un indicateur de manque de fraîcheur pouvant être dû au non-respect de la chaîne du froid pendant le processus de production et/ou de stockage. La valeur guide utilisée en Belgique est de 250 mg/kg.
Un échantillon de crevettes roses (Heiploeg Crevettes roses) en contenait au-delà de cette valeur guide.
La qualité bactériologique
Tous les poissons et les crustacés se dégradent rapidement en raison de composants azotés hydrosolubles présents dans leur chair. Ce processus est entièrement naturel et s’accompagne, surtout pour les crustacés, de toutes les contaminations liées aux multiples manipulations à la main durant le processus de traitement. Le risque de contamination par des agents pathogènes est donc plus élevé.
Ici, une attention toute particulière doit y être consacrée, car ces produits, précuits, sont destinés à une consommation froide, sans nouvelle cuisson susceptible d’éliminer certaines contaminations.
Pour les contrôles bactériologiques, effectués le jour de la date limite de consommation, nous avons tenu compte des paramètres suivants :
- Les indicateurs de sécurité alimentaire (Listeria monocytogenes, salmonelle)
- Les indicateurs d’hygiène (E. coli, Staph. Aureus)
- Les indicateurs de fraîcheur (germes psychrophiles, bactéries lactiques)
- Les indicateurs de conservation (moisissures)