Comment choisir des crevettes?
La crevette est un beau produit à l’apport nutritionnel séduisant, qui se décline en de nombreuses variétés. Grises ou roses, leurs conditions de production et leur circuit jusqu’à notre assiette diffèrent sensiblement. Comment faire le bon choix ?
Deux « couleurs » et différents calibres
Le marché se partage effectivement entre deux « couleurs » de crevettes.
D’un côté, il y a les crevettes grises (crangon crangon), appelées le "caviar de la mer du Nord". Elles font partie des crustacés les plus appréciés chez nous. C’est bien simple, le Belge en est le plus grand consommateur au monde. Devant les Hollandais, qui sont pourtant nos concurrents de pêche dans les eaux froides de la mer du Nord et de la Manche. Coûteuses, elles donnent une touche de raffinement à nos assiettes de fête.
De l’autre, les crevettes roses, qui viennent de partout dans le monde, où elles sont soit pêchées, soit cultivées. Moins coûteuses et plus adaptées à des préparations cuisinées, elles agrémentent plus souvent pizzas, plats en sauce ou encore poêlées asiatiques. Dans les magasins, elles sont vendues comme des crevettes, des gambas ou des scampis, mais ce sont des termes commerciaux qui ne disent rien sur l'espèce.
Au total, il existe environ 2 500 espèces de crevettes. Et même si on ne les retrouve pas toutes sur nos étals, loin de là, le choix ne manque pas.
Un produit extrêmement fragile et assez salé
Côté nutritionnel, les crevettes se placent plutôt bien. Dans la pyramide alimentaire, elles se situent au niveau des viandes, des volailles, du poisson et des œufs. C’est une source importante de protéines, qui plus est riche en acides gras de la série oméga-3 (DHA et EPA).
Petit bémol, elles sont naturellement assez salées : à raison de 1,6 % de sel en moyenne pour les crevette grises, un peu moins pour les roses. Ce n’est donc pas un produit à consommer quotidiennement.
Par ailleurs, vite périssables, elles sont aussi le plus souvent conservées à coup d’additifs, comme vous pourrez le lire dans notre Comment nous testons.
Quel type de crevette choisir?
En raison d’une demande forte de la part des consommateurs, y compris de grands formats, les crevettes sont aujourd’hui importées du monde entier. Toutes n’ont ni le même calibre ni forcément un goût identique.
On trouve souvent des subdivisions non scientifiques telles que les crevettes d'eau froide, d'eau douce tropicale et d'eau salée, des descriptions générales telles que la crevette "rose", ou encore le nom de crevette, scampi ou prawn. Pour subdiviser correctement, nous sommes obligés de nous rabattre sur les noms et classifications scientifiques.
Les plus importantes sont énumérées ci-dessous ; il est absolument impossible d'en donner un aperçu complet.
On distingue 16 familles différentes de crevettes, mais ce qui les différencie essentiellement sont :
- leur origine : elles proviennent soit des zones d’eaux froides (océan Atlantique Nord), soit des zones d’eaux chaudes (océan Pacifique, Asie);
- elles sont pêchées ou élevées;
- elles proviennent d’eaux douces ou d’eaux salées;
- leur calibre. En Amérique, le calibre est exprimé en nombre par livre anglaise. Les plus grandes sont appelées "U10" (« under ten », soit moins de 10), puis 10-15, 15-20, etc. Plus le chiffre est élevé, plus la crevette est petite. En Europe, un système similaire est utilisé, indiquant le nombre de pièce au kilo. Plus il y en a, plus la crevette est petite.
À cela s’ajoute le mode de production : sont-elles vendues crues ? Cuites ? Avec ou sans tête ? Avec ou sans intestin ? Congelées ou non ?
Les plus vendues chez nous
La crevette grise de la Mer du Nord, Crangon crangon
Elle est toujours pêchée (pas d’aquaculture) de mai à octobre dans les eaux de la Mer du Nord et de la Manche où elle vit dans les eaux côtières à une profondeur de 50 m. C’est le caviar de la mer du Nord. Crue, elle est grise comme son nom l’indique, mais cuite, elle prend une couleur brune.
Pas de risque de surpêche. On ne prélève – tous pêcheurs confondus - chaque année que 5 % de ce qui est disponible.
La crevette nordique, Pandalus borealis
Elle provient des eaux froides de l’Atlantique Nord (Norvège, Groenland, Danemark) où elle vit à une profondeur de 100 à 250 m. Elle est plus connue sous le nom de « crevette rose ». Très périssable, elle est immédiatement cuite et congelée après sa capture.
La crevette bouquet, Palaemon Serratus
Elle vit dans les mêmes mers froides que la crevette grise (elle est surtout pêchée en mer Baltique), mais est plus grande et a des marques zébrées sur sa carapace. Crue, elle est translucide, mais cuite, elle devient rose clair.
La crevette tigre, Penaeus monodon
C’est la plus grande des crevettes. Elle peut atteindre 40 cm antennes non comprise. Vivant en eaux salées chaudes, elle provient généralement d’Asie (Malaisie, Thaïlande, Indonésie) où elle est surtout élevée en aquaculture. Elle est vendue le plus souvent entière, avec la tête. Cuite et non décortiquée, elle est rouge ; décortiquée, sa chair a une jolie teinte rouge-blanc. Sa chair est ferme et son goût légèrement sucré, ce qui en fait une crevette très utilisée en gastronomie.
La crevette géante d’eau douce, Macrobantium rosenbergii
C’est l'une des premières espèces ayant pu être cultivées, elle est donc très présente sur les marchés du monde entier. Elle est principalement élevée dans les pays asiatiques, mais aussi en Afrique et en Amérique latine. Elle provient souvent du Bangladesh, de Birmanie, d'Indonésie, du Vietnam ou de l'Inde. Vous la reconnaîtrez facilement : on retrouve en général sa grande queue bleue congelée en magasin. Cuite, elle perd sa couleur bleue pour devenir rouge, comme un homard. Son goût n’est pas considéré comme le meilleur. Cultivée en eau douce, son goût peut être un peu « boueux ».
Pêchées ou cultivées ?
Les crevettes grises de la mer du Nord sont exclusivement pêchées. Les autres peuvent être soit pêchées, soit cultivées. Quelles sont les meilleures ? Ce n’est pas si simple à déterminer. Les deux façons de procéder ayant des avantages et des inconvénients.
Pour certains, les crevettes pêchées ont meilleur goût. Mais les conditions de pêche ne sont pas toujours idéales. Les Japonais, par exemple, procèdent à une première congélation à bord, mais une fois de retour au port, après plusieurs semaines ou mois selon le cas, la totalité de la pêche est décongelée, triée et congelée à nouveau. Lorsque cette opération est effectuée de manière professionnelle et avec la technologie actuelle disponible pour cela, il y a peu de risque de problème, mais…
Par ailleurs, les crevettes crues sont sujettes à la maladie de la « tache noire » rapidement après la pêche. Pour l’éviter, elles sont plongées dans une solution de bisulfite immédiatement après la capture. Elles contiennent donc toujours des additifs.
En aquaculture, les problèmes – et l’usage d’additifs ou d’antibiotiques – viennent des possibles maladies et pollutions. En théorie, les fermes piscicoles devraient assez bien maîtriser le processus et donc être en mesure de fournir un produit de bonne qualité.
Vous trouverez plus de détails à ce sujet dans notre dossier sur le poisson et la durabilité.
Épluchées ou non épluchées ?
On trouve les deux possibilités sur le marché et c’est une question de choix personnel.
Les crevettes roses et en général celles pêchées ou cultivées dans des pays lointains sont vendues aussi bien crues que cuites, congelées ou fraîches (parfois déjà congelées et décongelées, attention), décortiquées ou entières.
Les crevettes grises pêchées au chalut en mer du Nord ou dans la Manche, sont cuites à l’eau de mer (environ 5 minutes) directement à bord - ce qui les désinfecte - puis mises dans des sacs en plastiques et conservées à une température d’environ 2°C jusqu’à ce qu’elles soient vendues à la criée. Le processus de préparation à la vente se fait presque totalement de manière mécanique. Sauf l’épluchage qui est quasiment impossible à faire mécaniquement. Un épluchage manuel étant trop coûteux, le secteur n’a développé que peu d’ateliers de décorticage chez nous, préférant en développer dans des pays à bas salaires comme le Maroc.
Si vous désirez consommer des crevettes ultra fraîches, mieux vaut donc opter pour des crevettes grises non décortiquées.
De chez nous ou du monde entier ?
Les produits pêchés ou cultivés dans l’Union Européenne doivent répondre à des critères de sécurité alimentaire précisés dans la législation européenne. Hors cela, ils ne peuvent être commercialisés.
Les produits pêchés ou cultivés hors de l’Union Européenne doivent répondre aux exigences de l’UE en matière d’importation de poissons, de produits de la pêche ou de fruits de mer. Ils sont soumis à des contrôles, doivent être traçables, passer par des entreprises reconnues et respecter les mêmes obligations en matière d’additifs et d’étiquetage que les produits issus de l’UE.
La protection sanitaire est donc théoriquement identique.
Avec ou sans label ?
Le label MSC (Marine Stewardship Council) combat principalement la surpêche et encourage des méthodes de pêche durables, respectueuses des populations de poissons, de l’écosystème et des lois.
Du côté de l’aquaculture, vous pouvez vous fier au label ASC (Aquaculture Stewardship Council), gage de production responsable pour l’élevage de poissons, coquillages et crustacés. Lorsque vous choisissez du poisson certifié ASC, il provient d’une ferme où la nature, l’eau, l’environnement, la santé des poissons et de bonnes conditions de travail sont assurés avec soin. Les fermes aquacoles certifiées ASC sont contrôlées par un organisme de certification indépendant. Toutes les entreprises de la chaîne qui transforment le poisson doivent être certifiées.
Nous avons déjà établi dans le passé que ces labels sont fiables.