Pesticides: tous les enfants exposés


Les insecticides pyréthrinoïdes et organophosphorés que nous avons ciblés figurent parmi les pesticides les plus couramment utilisés. On y recourt en agriculture, en horticulture, dans l’industrie et chez soi pour lutter contre une grande variété d’insectes. Ils sont aujourd’hui omniprésents dans l’environnement et nos milieux de vie.
L’ampleur de leur usage et leur dissémination font que - par ingestion, inhalation ou contact cutané - nous y sommes tous exposés.
Dans l’organisme, les pesticides se transforment en différents métabolites (produits de dégradation) qui sont ensuite excrétés dans l’urine. Ce sont ces marqueurs – 4 pour les insecticides pyréthrinoïdes et 6 pour les insecticides organophosphorés – que nous avons recherchés dans l’urine de 84 enfants afin d’évaluer leur exposition à une trentaine de pesticides dits "non persistants". En effet, leurs métabolites ne sont parfois détectables que quelques heures ou quelques jours dans l’urine.
100 % des enfants testés, exposés
Avec certitude, nous savons que les enfants ayant participé à l’étude ont tous été exposés, peu avant les prélèvements, à au moins 1 insecticide organophosphoré, et 83 sur les 84 enfants à au moins 1 insecticide pyréthrinoïde. Aucune urine n’était donc exempte de métabolite de pesticides.
Il n’existe aucune norme légale qui fixe des concentrations urinaires à ne pas dépasser pour ces pesticides. Il n’est pas possible de prédire si les concentrations détectées dans les urines auront ou non des effets néfastes sur la santé des enfants. Le lien avec une quelconque maladie est d’autant plus difficile à établir que les enfants sont confrontés quotidiennement à de nombreuses substances chimiques, autres que les insecticides, qui peuvent, elles aussi, avoir des effets toxiques.
Nous savons seulement que, pour certaines substances pouvant perturber les systèmes endocrinien et reproducteur des enfants, aucune dose n’est totalement exempte de risques.
Réduire l’exposition
Il nous paraît donc urgent d’agir, à tous niveaux, pour éviter au maximum l’exposition du public à ces substances toxiques que sont la plupart des pesticides de synthèse. A l’évidence, il faut réduire leur utilisation tant professionnelle que domestique, et à terme, les faire disparaître progressivement de notre agriculture, de notre alimentation, de notre quotidien.
Que pouvez-vous faire pour éviter que votre enfant soit exposé à des substances toxiques? Consultez nos conseils ici.
Les études épidémiologiques lient de plus en plus souvent l’exposition aux pesticides à des effets sanitaires graves tels que cancers, troubles neurologiques, atteintes aux fonctions reproductrices.
Epinglant le caractère neurotoxique de ces insecticides, des chercheurs évoquent leur possible contribution au développement de maladies neurodégénératives, comme celles de Parkinson et d’Alzheimer.
Certains insecticides sont également reconnus ou suspectés d’être des perturbateurs endocriniens, susceptibles de favoriser l’apparition de problèmes hormonaux entraînant hypofertilité masculine, puberté précoce chez les filles, cancers du sein, de la prostate, du rein ou des testicules. Des perturbations de la fonction thyroïdienne et des troubles métaboliques pouvant mener au diabète type 2 et à l’obésité sont également citées ainsi que des pathologies du spectre autistique.
Les enfants plus fragiles
Le principe de toxicologie selon lequel "c’est la dose qui fait le poison" ne s’applique pas aux perturbateurs endocriniens. Les scientifiques soutiennent aujourd’hui qu’il n’existe pas de seuil en deçà duquel tout risque de toxicité est exclu. C’est davantage la période d’exposition qui importe.
L’immaturité des systèmes physiologiques des enfants, leur stade de développement rapide lors de l’exposition aux pesticides, la quantité plus élevée de nourriture et d’eau rapportée à leur poids, ou encore leur comportement main-bouche augmentant leur exposition justifient donc que nous accordions une attention particulière à l’exposition des plus jeunes.
Nos résultats d’analyse font craindre que les enfants belges y soient cependant confrontés de façon quasi permanente.
Nos 12 conseils
- Lavez consciencieusement les fruits et légumes, ou épluchez-lez avant de les consommer.
- Privilégiez les produits bio, artisanaux, garantis sans pesticides (à nettoyer et peler aussi car ils peuvent être malgré tout contaminés par des traces de pesticides)
- Cuisiner soi-même, plutôt qu’acheter des plats préparés, permet de mieux maîtriser l’origine des ingrédients.
- Privilégiez les produits locaux et de saison car ces derniers sont moins soumis aux aléas de la conservation et donc à l’utilisation de pesticides et de conservateurs.
- Varier les aliments et leurs origines réduit les risques d’accumulation de substances liés à certaines productions.
- Utilisez un minimum de pesticides dans le jardin, pensez à la lutte intégrée contre les insectes (coccinelles contre les pucerons).
- Evitez l’utilisation de pesticide à l’intérieur. Préférez les moustiquaires; noyers, sureaux, citronnelle et tagètes éloignent les mouches; la lavande est efficace contre les mites dans vos penderies.
- Nettoyez régulièrement votre logement à l’eau de façon à réduire l’exposition via la poussière domestique.
- Aérez les pièces de vie.
- Lisez le mode d’emploi des insecticides pour éviter d’en utiliser trop et ventilez les pièces traitées avant d’y pénétrer.
- Ne jamais utiliser de produits insecticides dans les chambres d’enfants ou de femmes enceintes.
- Contre les poux, évitez les shampoings à base d’insecticides.