Pollution: jusqu'à 261 polluants chimiques contaminent nos enfants

En juin 2021, nous avons fait prélever une petite mèche de cheveux de 3 cm (à la racine) auprès de 101 enfants âgés de 3 à 15 ans. Le biomonitoring de ces échantillons permet de révéler l'exposition chronique à la pollution de ces enfants au cours des trois derniers mois (les cheveux poussent en moyenne d'1 cm par mois). Concrètement, un laboratoire spécialisé a procédé à la recherche de 1 800 polluants organiques.
Jusqu'à 12 polluants par enfant
Quelque 261 polluants ont été découverts, dont 56 chez plus de deux enfants. Avec, parfois, des polluants extrêmement différents au sein d'une même fratrie, voire entre vrais jumeaux. Seuls trois enfants, parmi les 101 testés, n'étaient contaminés que par un seul polluant. Aucun enfant n'échappe donc à la pollution, en Flandre comme en Wallonie et à Bruxelles, en ville comme à la campagne. Et les bouts d'chou ne sont pas épargnés, puisque la contamination apparaît dès l'âge de 3 ans, comme nos experts l'ont expliqué durant notre conférence de presse.
Le laboratoire a détecté une moyenne de 5,5 polluants par enfant, mais certains en comptaient bien davantage. Près d'un tiers (31 %) de nos jeunes testés font montre d'une toxicité chronique élevée puisque leurs cheveux contiennent plus de 7 polluants organiques et jusqu'à 12 pour certains. Bien qu'impressionnant, ce chiffre n'atteint heureusement pas le seuil d'alerte fixé par les experts du laboratoire (à partir de 20 polluants). Un petit nombre de résultats (15/554) dépasse 2 nanogrammes/gramme de cheveu, ce qui requiert de chercher la source de l'exposition chronique afin de pouvoir éliminer la cause de la contamination.
Certains polluants interdits depuis très longtemps
Parmi les polluants découverts, pas moins de 23 substances chimiques s'avèrent interdites chez nous, parfois depuis de nombreuses années. Ainsi le « DNOC », un pesticide interdit depuis... 1999 ! Ou encore l'Atrazine, dépisté chez un des enfants (né bien après l'interdiction du produit en 2012), un autre herbicide persistant dont les résidus peuvent se retrouver des années encore après leur interdiction (notamment dans l'eau de distribution dans le cas de l'Atrazine). Nous avons également trouvé un produit de la famille des carbamates, le Carbofuran-3-OH-7-phenol, métabolite d'un pesticide utilisé contre les insectes dans les cultures de pommes de terre, de blé, de riz et de soja. Neurotoxique et interdit en Europe, il est suspecté d’être un perturbateur endocrinien. Il n'empêche qu'il peut encore être utilisé dans des pays moins scrupuleux en-dehors de l'Union européenne, par des agriculteurs dont les produits se retrouvent au final… à nouveau dans notre assiette.
Lire notre dossier sur les enfants & la pollution
Les pesticides et les produits de leur dégradation occupent plus de 60 % du panel de polluants découverts chez les enfants. Ce sont des insecticides, des herbicides, des fongicides (contre les champignons et moisissures), des rodenticides (contre les rongeurs), des molluscicides (anti-limaces)... Rappelons que la Belgique fait partie du trio de tête des pays européens qui utilisent le plus de pesticides dans leur agriculture.
Les médicaments (antibiotiques, vermifuges), tant à usage vétérinaire qu'humain, arrivent en deuxième position (10 %). Ils sont talonnés (9,2 %) par les intermédiaires chimiques de synthèse à l'instar des retardateurs de flamme et plastifiants utilisés notamment dans l'industrie textile et les produits ménagers (le Tri-iso-butyl phosphate a, par exemple, été détecté chez 13 enfants).
Quel risque pour la santé ?
Toutes ces substances ne sont pas forcément toxiques. La toxicité est un concept relatif, dépendant notamment de la quantité à laquelle l'organisme est exposé. Et chaque personne y réagit différemment en fonction de sa sensibilité à la substance et des périodes de la vie (les enfants et les femmes enceintes sont par exemple plus vulnérables). S’il est impossible d’échapper complètement à notre environnement pollué, un mode de vie sain – une alimentation équilibrée, bio et locale, une activité physique régulière et un choix de produits de consommation non toxiques – permet cependant de réduire notre exposition (lire nos conseils).
Certains polluants identifiés sont toutefois avérés, et d'autres suspectés, d'être cancérigènes (cancer), mutagènes (dommages génétiques), tératogènes (effets sur le foetus), reprotoxiques (problèmes de fertilité), neurotoxiques (toxiques pour le système nerveux) et, pour beaucoup, d'être des perturbateurs endocriniens (effets hormonaux). Sans compter les nombreux allergènes, ainsi que les nouvelles molécules chimiques qui inondent chaque jour le marché et dont on ignore encore tout.
L'un des risques majeurs de cette pollution à laquelle nos enfants et nous-mêmes sommes quotidiennement exposés réside dans « l'effet cocktail », un processus qui fait qu’en s’associant, des molécules, même a priori inoffensives, peuvent par synergie s’avérer délétères pour notre organisme.
Nos revendications
En tant qu'association de consommateurs, il nous revient d'informer, de sensibiliser et de dénoncer les points problématiques relevés lors de nos différentes enquêtes. Nous alertons donc les autorités et demandons :
- Davantage de contrôles (un certain nombre d'enfants sont clairement exposés à des substances pourtant interdites);
- L'interdiction de vente, via des opérateurs européens, de produits interdits en Europe;
- Davantage de recherche sur l'effet cocktail sur notre santé (principe de précaution);
- Plus de rigueur au niveau des (ré)autorisations de pesticides.
Vous avez une question ?
Pour plus d'informations, consultez notre dossier complet sur le sujet. Vous pouvez également appeler les experts de notre service d'aide tous les jours ouvrables, de 9 h à 12 h 30 et de 13 h à 17 h (16 h le vendredi).
APPELEZ NOS EXPERTS AU 02 542 33 33