Non, il n'y a pas de médicament contre le coronavirus

Plus on avance dans la crise sanitaire liée au coronavirus, plus on voit apparaître des messages peu nuancés dans les médias. Des messages qui peuvent donner de faux espoirs au public. Un médicament contre la malaria dont il est beaucoup question depuis quelques jours en est le parfait exemple. « Un médicament contre le paludisme pour lutter contre le coronavirus » ou encore « Un traitement anti-malaria inhibe le coronavirus » ne sont que quelques-uns des titres que nous avons vus dans les journaux.
On sait que le traitement contre le paludisme peut tuer les coronavirus en cultures cellulaires. Mais dans quelle mesure est-il efficace chez les patients ? Seul l'avenir le dira.
Un message d'espoir découvert... chez nous
La chloroquine (et l'hydroxychloroquine) est un vieux médicament contre la malaria utilisé chez nous comme traitement de deuxième ligne dans les formes graves de certaines maladies inflammatoires telles que la polyarthrite rhumatoïde et le lupus érythémateux.
Si d'importantes recherches sont actuellement menées sur ce médicament, c'est grâce au départ à la découverte d'un Belge, le Pr. Van Ranst, virologue réputé à l'Institut Rega de la KULeuven. Le virus actuel, baptisé SRAS-CoV-2, est une nouvelle variante au sein de la famille des coronavirus. Deux autres virus de ce groupe, le SRAS et le MERS, ont déjà causé des soucis sanitaires en Asie en 2003 et 2012. En 2004, le Pr. Van Ranst avait pu démontrer que le traitement à la chloroquine contre le paludisme était efficace contre le virus du SRAS en lignées cellulaires. Entre-temps, cet effet a également été prouvé pour le coronavirus actuel, toujours dans des cultures cellulaires.
Beaucoup d'études et pas mal de lacunes
Une vingtaine d'études cliniques sont en cours en Chine, où la chloroquine est testée sur des patients touchés par le Covid-19. Bien que le gouvernement chinois ait été très enthousiaste à ce sujet il y a un mois, aucun résultat n'a encore été publié, pour aucune de ces études. Ce que nous savons déjà, c'est qu'il s'agit systématiquement de petits groupes de patients. Groupes probablement trop petits pour pouvoir en tirer des conclusions fiables.
Pour une étude à grande échelle
L'Agence européenne des médicaments (EMA) a récemment demandé que des études solides, à grande échelle, soient lancées, auxquelles plusieurs pays puissent participer. L'EMA entend ainsi empêcher, entre autres, la multiplication de petites études et une utilisation en dehors des études cliniques.
L'appel a depuis été entendu. Plusieurs études à grande échelle sont en cours. L'une d'elles, coordonnée par l'Institut français de recherche publique (Inserm), porte sur 3 200 patients.
Outre l'efficacité de l'hydroxychloroquine, d'autres médicaments seront également étudiés : un médicament qui était sur le point de traiter l'Ebola (le remdesivir), ainsi qu'un autre utilisé dans le traitement du VIH (ritonavir/lopinavir), en combinaison ou non avec un traitement utilisé dans la sclérose en plaques (interféron bêta). Plusieurs hôpitaux belges participent à cette étude. Nous vous tiendrons bien sûr informés des résultats.
Application expérimentale
Ces médicaments peuvent cependant déjà être utilisés dans certains cas. En effet, dans chaque pays, les autorités compétentes ont élaboré des lignes directrices pour le traitement des patients atteints du Covid-19. Ces recommandations sont basées sur les informations scientifiques les plus récentes, et sont fréquemment mises à jour. Selon ces directives, chez nous, l'utilisation du médicament contre le paludisme est « expérimentale » et ne doit être pratiquée qu'en milieu hospitalier. Il convient également de rappeler que le recours à ce produit peut provoquer des effets secondaires, notamment des arythmies cardiaques.
Tout cela n'empêche pas de nombreuses personnes de se demander s'il est possible d'acheter de l'(hydroxy)chloroquine à titre préventif chez le pharmacien... Nous rappelons qu'il ne sert à rien de prendre ce médicament de manière préventive. Bien au contraire, il peut s'avérer dangereux. L'Agence du médicament a dès lors interdit aux pharmaciens d'en vendre. Les officines ne sont autorisées à fournir ce produit qu'aux patients qui sont traités pour leur pathologie chronique (lupus, polyarthrite rhumatoïde).