Le Mounjaro: meilleur que l’Ozempic pour maigrir?

Il fait le buzz sur TikTok. Et, à en croire certains médias, il pourrait bien devenir le médicament le plus vendu au monde…

Il s’agit du Mounjaro. Cet antidiabétique n’est pas encore vendu en Belgique, mais c’est sans doute pour bientôt. Il figure déjà sur la liste de notre Agence Fédérale des Médicaments et des Produits de Santé (AFMPS).

Selon certains médias, le médicament pourrait être disponible chez nous cette année encore, mais le porte-parole du fabricant Eli Lilly n'a pas pu ou voulu confirmer cette information.

Aux Etats-Unis, et en dépit de son prix insensé (jusqu’à plus de 1 000 dollars par mois), le Mounjaro est très populaire pour maigrir, y compris chez des non diabétiques. Une tendance qui pourrait aussi envahir la Belgique dans un futur proche une fois que ce médicament sera disponible, comme avec l’Ozempic. 

Raison de plus pour quelques questions et réponses.

Qu’est-ce que le Mounjaro?

Le Mounjaro est le nom de marque du tirzépatide, un médicament injectable vendu sur ordonnance et récemment approuvé par l’Agence européenne du médicament (AEM) et la FDA américaine pour le traitement de patients souffrant de diabète de type 2. 

En dépit du succès du tirzépatide comme amaigrissant, il n’est pas autorisé pour le traitement du surpoids et de l’obésité. Cela pourrait changer dans l’avenir. Son fabricant a en tout cas obtenu de la FDA l’autorisation de lancer une procédure accélérée d’enregistrement de ce médicament comme traitement de l’obésité. 

Les discussions avec l’AEM sur le tirzépatide comme traitement de l’obésité sont également déjà en cours.

Comment agit le Mounjaro ou le tirzépatide? 

Ce médicament stimule artificiellement deux hormones libérées naturellement dans l’organisme après avoir mangé: 

1. Le Glucagonlike peptide-1 (GLP-1): cette hormone intestinale stimule le pancréas pour qu’il produise davantage d’insuline en réaction aux aliments, ce qui a un impact sur le taux de sucre dans le sang. Cette hormone freine également l’appétit et augmente le sentiment de satiété. 
2. Le peptide insulinotrope dépendant du glucose (GIP): cette hormone stimule également la libération d’insuline par le pancréas lors de la digestion. 

Quelle est la différence entre l’Ozempic et le Mounjaro?

L’Ozempic et le Mounjaro ont beaucoup en commun:

• Les deux médicaments sont approuvés par l’EMA et la FDA pour le traitement du diabète de type 2. 
• Tous deux doivent être injectés une fois par semaine dans le ventre, la cuisse ou le haut du bras. 
• Tous deux stimulent l’action de l’hormone intestinale GLP-1. 

Mais il y a aussi des différences: là ou l’Ozempic n’imite qu’une seule hormone intestinale, le Mounjaro en imite deux : GLP-1 et GIP. 

Quelle est l’efficacité du Mounjaro pour maigrir?

La question fait actuellement l’objet d’une série d’études en cours: les études SURMOUNT. On connaît déjà les résultats d’une de ces études, portant sur des non-diabétiques.

Quel poids peut-on perdre avec le Mounjaro?  

L’étude précitée peut donner une indication du poids qu’on peut perdre avec ce médicament. Plus de 2 500 sujets y ont pris part, tous présentant une obésité ou un surpoids important (105 kilos en moyenne), mais donc non diabétiques. 

Les participants ont reçu une injection hebdomadaire de 5 mg, 10 mg ou 15 mg de tirzépatide ou un placebo. Ensuite, ils ont aussi bénéficié d’un accompagnement pour suivre un régime amaigrissant et pour faire 150 minutes d’exercice par semaine. Ce régime devait viser à atteindre un déficit calorique de 500 kcal par jour (l’équivalent de deux doubles tartines avec du fromage). Un régime assez sévère, donc. L’effet du tirzépatide sans régime sévère ni accompagnement professionnel n’a pas été étudié.

Voici les résultats au bout de 72 semaines: 

Le tirzépatide agit-il chez tout le monde? 

La réponse est non. Dans le groupe à qui on a administré la plus forte dose de tirzépatide, environ un participant sur dix n’est pas parvenu à perdre 5 % de son poids corporel, ce que les scientifiques considèrent généralement comme un résultat “cliniquement significatif”. 

Un sur six n’est pas parvenu à perdre 10 % de son poids.

Nombre de personnes qui n’ont pas réussi à perdre au moins 5 % de leur poids corporel

Nombre de personnes qui n’ont pas réussi à perdre au moins 10 % de leur poids corporel

Le Mounjaro est-il plus efficace que l’Ozempic pour perdre du poids? 

Contrairement aux bruits qui circulent, on ne le sait pas encore avec certitude. Il n’y pas encore suffisamment d’études disponibles comparant directement le tirzépatide (dans le Mounjaro) et le sémaglutide (la substance active de l’Ozempic et du Wegovy).

Le Mounjaro agit-il encore aussi efficacement après un certain temps?

Cela n’a pas encore été étudié, donc on ne le sait pas. Jusqu’ici, la plus longue étude sur le tirzépatide a duré 72 semaines.

Que se passe-t-il si on arrête le Mounjaro? 

On va probablement reprendre du poids, comme c’est le cas avec tous les médicaments amaigrissants.

En mai 2023, on devrait normalement disposer des résultats de l’étude SURMOUNT-4. Elle a suivi 783 sujets non diabétiques pendant environ un an et demi (88 semaines). Tous ont commencé avec du tirzépatide. La moitié environ des participants (choisis arbitrairement) passent à un placebo à partir de la 36ème semaine sans en être avertis. Les autres continuent le traitement avec le tirzépatide. On devra donc en savoir plus.

Est-ce une bonne idée d’utiliser le Mounjaro "off-label" pour maigrir?

Le tirzépatide semble efficace dans l’étude mentionnée ci-dessus, mais on ne sait pas encore clairement si cet avantage l’emporte sur les risques (voir plus loin). L’Agence européenne du Médicament ne s’est pas encore prononcée à ce sujet. 

Au moment où nous écrivons ces lignes, seule une étude “phase 3” à grande échelle portant sur 2 500 sujets et centrée sur la perte de poids se termine avec des non diabétiques. Dans une étude phase 3, le médicament testé est administré à un grand nombre de patients, souvent des milliers, pour confirmer le rapport risques/avantages. 

Même quand nous connaîtrons les résultats d’une série d’études qui vont bientôt s’achever (et dont les résultats peuvent être attendus en avril et mai de cette année), il restera pas mal de points d’interrogation. Ainsi, on ne saura pas encore si, et dans quelle mesure des injections de tirzépatide entraînent un gain de santé et une meilleure qualité de vie. 

Il semble évident que maigrir quand on est en surpoids est meilleur pour la santé, mais ce n’est pas nécessairement le cas quand on utilise un médicament. 

Des études indiquent jusqu’ici une légère amélioration de la tension artérielle et du bilan lipidique (le cholestérol notamment) de participants recevant du tirzépatide. Mais on ne sait pas encore si cela se traduit à long terme par moins d’accidents cardiaques, d’AVC et de décès. 

On en saura peut-être un peu plus en octobre 2027. On connaîtra alors les résultats d’une étude à ce sujet portant sur pas moins de 15 000 participants. 

Quels sont les effets secondaires possibles du Mounjaro?

Comme avec tout médicament, des effets secondaires indésirables ne sont pas exclus. Dans l’étude portant sur des non diabétiques, un effet secondaire possible a entraîné l’arrêt du traitement chez 4,3 % à 7,1 % (en fonction de la dose) des sujets.

Problèmes gastro-intestinaux légers

Les effets secondaires les plus fréquents sont des problèmes gastro-intestinaux légers à modérés. Dans l’étude citée plus haut, des sujets ont surtout souffert de: 

• nausées (jusqu’à 33 % dans le groupe tirzépatide contre 10 % dans le groupe placebo)
• diarrhée (jusqu’à 13 % contre 7 %)
• constipation (jusqu’à 17 % contre 6 %)

Selon les chercheurs, c’est au début du traitement que le risque est le plus important. 

Effets secondaires rares, mais sérieux

Les effets secondaires graves semblent rares jusqu'à présent.

Dans l’étude évoquée ci-dessus auprès de non diabétiques, 1 utilisateur sur 100 environ a présenté un très faible taux de sucre dans le sang (moins de 54 mg/dl). 

Selon la notice, il existe aussi un faible risque de pancréatite aiguë. Cela concernerait moins d’un utilisateur sur 100. Cette affection peut entraîner de violentes douleurs abdominales et dorsales. Si on ressent de tels symptômes il faut immédiatement alerter un médecin. 

Le fabricant met également en garde contre un risque accru de tumeurs et de cancer de la glande thyroïde. En cas de grosseur et de gonflement dans le cou, de problèmes de déglutition, d’enrouement ou d’essoufflement, il faut contacter d’urgence son médecin. 

Contrôle supplémentaire

Le Mounjaro est placé sous “surveillance renforcée”, car il s’agit d’un nouveau médicament dont le profil de sécurité n’est pas encore bien connu (ce qui explique le triangle noir figurant sur l’emballage). Ce n'est que lorsqu'un plus grand nombre de personnes prennent un médicament sur une plus longue période que les effets secondaires moins fréquents et vraiment rares sont également mis en évidence.

Mises en garde et précautions d’utilisation

Ce médicament est déconseillé aux femmes enceintes ou allaitantes. On ignore si le tirzépatide passe dans le lait maternel. Un risque pour le bébé ne peut pas être exclu. 

Ce médicament n’est pas non plus destiné aux enfants et aux jeunes de moins de 18 ans, faute d’avoir été étudié dans ce groupe d’âge. 

En raison du manque de données, une prudence particulière est notamment requise dans les cas suivants: 

• personnes avec des antécédents de pancréatite
• graves maladies gastro-intestinales
• sujets diabétiques avec rétinopathie diabétique (une atteinte des vaisseaux sanguins de la rétine) ou d’autres maladies oculaires
• personnes avec de graves problèmes rénaux ou hépatiques

Ne perdez pas de vue que le tirzépatide peut éventuellement interagir avec d’autres médicaments. Le fabricant met ainsi en garde contre une moindre efficacité de la pilule contraceptive.