Plainte contre un médicament à 2 millions d'euros

2 millions d’euros environ. C’est le prix réclamé par Novartis pour son Zolgensma, un médicament utilisé pour traiter l’amyotrophie spinale (SMA). Des prix à ce point excessifs menacent l’équilibre de tout notre système de soins de santé. Nous avons dès lors introduit une plainte auprès de l’autorité de la concurrence.
Prix prohibitif pour un médicament vital
Le Zolgensma a défrayé chronique il y a deux ans déjà avec l’histoire du bébé Pia. A l’époque, ce médicament n’était pas encore autorisé en Belgique. Grâce à une campagne de crowdfunding, ses parents ont réussi à réunir la somme désespérée de 2 millions d'euros pour pouvoir administrer à leur fille cette unique perfusion.
Cette perfusion pourrait sauver la vie de l’enfant. En effet, en l’absence de traitement, la SMA est très souvent fatale. La plupart des petits patients traités avec le Zolgensma ont heureusement une meilleure espérance de vie, peuvent respirer sans assistance, beaucoup parviennent à s’asseoir, et certains même à marcher. Ce traitement est moins invasif que le seul autre médicament disponible chez nous, le Spinraza, qui doit être administré la vie durant. Ce médicament coûte 265 000 € par an. C’est pourquoi nous avions déjà porté plainte, il y a plus de deux ans auprès de l’autorité de la concurrence contre la firme pharmaceutique Biogen pour abus de position dominante.
Lors de la commercialisation du Zolgensma, Novartis a hélas suivi la tendance déjà initiée avec le Spinraza. Son prix de 2 millions d’euros en fait aujourd’hui le médicament le plus cher du monde.
Les géants de la pharmacie engrangent les bénéfices
Les firmes pharmaceutiques prétendent que les montants faramineux réclamés pour ce type de médicaments sont essentiels pour elles. Elles invoquent systématiquement leurs frais de recherche et de développement. Mais elles se gardent bien de communiquer de manière transparente sur ces frais. C’est pourquoi nous avons fait nous-mêmes l’exercice à leur place. Nous estimons les frais de développement de ce médicament à 512 millions d’euros, un montant déjà récupéré au bout d’un an à peine. Moins de 2,5 ans après sa commercialisation, Novartis avait déjà engrangé près de quatre fois cette somme. Sachant que les nouveaux médicaments sont protégés par un brevet pendant 13 ans en moyenne, Novartis a donc de coquets bénéfices en perspective.
De plus, il faut savoir que le Zolgensma a en fait été développé par une petite firme, AveXis, mais son concept venait encore d’ailleurs, à savoir de l’institut de recherche d’un hôpital américain, avec un financement essentiellement public. AveXis a ensuite obtenu les droits exclusifs de développement et de commercialisation du Zolgensma, mais une bonne partie de la recherche a dont été payée par le contribuable américain. Fort heureusement, la Belgique a pu négocier, conjointement avec quelques autres pays européens, une réduction permettant de rembourser (temporairement) le médicament, mais le montant de cette réduction reste secret. Ce que nous déplorons vivement.
Des mesures structurelles s’imposent
Pour nous, il est donc clair qu'à l’instar de Biogen, Novartis abuse lui aussi de sa position dominante. Ce qui est totalement illégal. En outre, de tels prix compromettent l’équilibre de notre système de santé. Car il reste encore beaucoup de Pia. Des prix à ce point excessifs peuvent contrarier le remboursement d’autres médicaments très prometteurs. Voilà déjà des années que nous exigeons des mesures structurelles pour maintenir les prix dans des limites acceptables. En portant plainte contre Novartis, nous tirons une nouvelle fois le signal d’alarme. En espérant que l’autorité de la concurrence réagisse rapidement.