Les soins donnés dans les hôpitaux en Belgique sont-ils de bonne qualité?

Est-ce que les soins dans les hôpitaux belges sont bons?

La réponse à cette question est nuancée.

La Belgique obtient de très bons résultats dans certains domaines, mais plus décevants pour d’autres. Depuis plusieurs années, le Centre Fédéral d’Expertise des Soins de Santé (KCE) évalue régulièrement les performances de notre système de soins, en collaboration avec plusieurs autres instances publiques.

Notre pays offre par exemple des soins de qualité en matière de traitement du cancer du sein, les résultats sont moyens pour les AVC et mauvais pour la prévalence des infections nosocomiales. Il s’agit des résultats pour tous les hôpitaux du pays rassemblés.

La qualité des soins n'est pas identique dans tous les hôpitaux en Belgique

Mais il existe des différences entre établissements.

Par exemple, une récente étude du KCE sur le traitement du cancer du sein mettait en évidence ceci. Les femmes prises en charge dans un hôpital à "faible volume" (moins de 60 nouveaux diagnostics par an) présentent un risque 44 % plus élevé de mourir des suites de ce cancer que les femmes prises en charge dans un hôpital avec un "haut volume" (125 nouveaux diagnostics par an ou plus).

Selon l'hôpital choisi, les femmes qui souffrent du cancer du sein ont un risque 44 % plus élevé de mourir.

Le ministre de la Santé Franck Vandenbroucke a d’ailleurs pris des mesures à ce niveau. Depuis août 2024, seuls les centres agréés sont autorisés à effectuer des opérations en cas de cancer du sein. Si vous l’effectuez dans un établissement qui n’est pas agréé, vous ne bénéficiez d’aucun remboursement. Attention : ces interventions ne peuvent être pratiquées que par les centres de coordination, mais aussi par les centres dits "satellites". Or, ces derniers ont beaucoup moins d'expérience et le taux de survie y est moins élevé.

Le choix de l’hôpital dans lequel vous vous rendez peut donc faire une grande différence. Qui plus est, chaque hôpital se compose de différents services, dans lesquels travaillent de nombreux médecins. Un établissement peut donc être des plus compétents pour certains problèmes de santé, et moins pour d’autres.

Comment bien choisir son hôpital?

Choisir son hôpital en utilisant les informations disponibles est plus simple en Flandre qu'en Wallonie ou à Bruxelles.

Si vous désirez choisir un hôpital en Flandre, les sources d'information sont multiples (zorgkwaliteit.be, site de Sciensano, inspection des hôpitaux, etc.).

Mais en Wallonie et à Bruxelles, c‘est une toute autre histoire. Il n’y a presque pas d’informations publiques disponibles pour ces deux Régions. Les consommateurs sont donc contraints de choisir un hôpital en ne disposant d'aucune information ou presque. Or, faire un choix en toute connaissance de cause est un droit crucial pour tout consommateur. Sans compter que le choix d’un établissement peut avoir des conséquences directes sur votre santé.

Parmi les quelques sources disponibles, vous pouvez toujours :

• consulter le site de Sciensano. L’organisme partage des informations sur les efforts faits par les différents établissements pour éviter les infections nosocomiales.
• vérifier sur le site d’un hôpital s’il est accrédité ou non (voir explication ci-dessous).
• en principe, demander le rapport d’inspection d’un hôpital aux pouvoirs publics.
• vous renseigner sur l'expérience de votre médecin/hôpital concernant l'intervention que vous devez subir. Dans notre pays, la plupart des interventions peuvent être pratiquées par tous les hôpitaux. Cependant, cela n'est pas toujours avantageux pour le patient.
• en discuter avec votre médecin traitant.

Vous n’avez pas toujours le choix de votre hôpital

Sachez qu’il n’est pas toujours possible de choisir son hôpital. Si vous êtes victime d’un AVC, par exemple, l’ambulance vous conduira à l’hôpital le plus proche.

Si vous devez subir une intervention après avoir consulté un médecin spécialiste en dehors de l'hôpital, c'est lui qui déterminera le choix de l'hôpital. Plusieurs médecins spécialistes consultent dans un cabinet privé, tout en collaborant avec un hôpital où ils pratiquent des interventions chirurgicales. Si, pour une raison quelconque, vous souhaitez être traité par un médecin en particulier, vous n'avez généralement pas le choix de l'hôpital.

Les services d'urgence en Belgique sont-ils efficaces?

​Pourquoi il n’est pas possible de comparer la qualité des hôpitaux en Wallonie et à Bruxelles?

À Bruxelles et en Wallonie, les citoyens ne disposent pratiquement d'aucune information sur la qualité des soins prodigués dans les hôpitaux, à l'exception d'une série d'indicateurs de qualité mesurés dans le cadre de la prévention des infections nosocomiales. Leur retard par rapport à la Flandre est énorme dans ce domaine. Il y a plus de dix ans, la Wallonie a approuvé un plan et un budget correspondant pour améliorer la qualité des soins dans les hôpitaux. Mais depuis lors, rien n‘a plus évolué.

Récemment, tant Bruxelles que la Wallonie ont inscrit la qualité dans les hôpitaux à leur agenda :

• À Bruxelles, une législation a été adoptée concernant de nouvelles normes pour les hôpitaux, dont fait partie la politique de qualité.
• En Wallonie, le gouvernement a approuvé durant l’été 2025 un plan stratégique pour les hôpitaux, dont la politique de qualité fait partie intégrante.

L'idée que la qualité des soins doit être mesurée semble désormais mieux acceptée dans la partie francophone du pays. La mesure de la qualité à l'aide d'indicateurs de qualité sera également effectuée de manière systématique à Bruxelles et en Wallonie.

Les résultats ne seront toutefois pas disponibles à court terme pour les citoyens.

La Flandre a une avance énorme en matière d'informations sur la qualité des soins prodigués dans les hôpitaux.

Comment la Flandre parvient à mesurer la qualité de ses hôpitaux ?

La situation est bien différente en Flandre. La qualité des hôpitaux repose sur trois piliers :

• la mesure de la qualité à l'aide d'indicateurs de qualité.
• l'inspection des hôpitaux.
• l'accréditation.

C’est l’organisme VIKS qui se charge d’évaluer la qualité des hôpitaux et d’en publier les résultats sur le site zorgkwaliteit.be. Une série d’indicateurs de qualité, basés sur des preuves scientifiques et les bonnes pratiques en matière de soins de santé, permettent d’évaluer les établissements. Les résultats sont utiles à la fois :

• aux hôpitaux, afin de les aider à améliorer la qualité de leurs soins.
• aux patients, qui disposent d’informations utiles pour faire choisir le bon hôpital.

Les hôpitaux sont libres de participer ou non à l'évaluation de la qualité. Tous les hôpitaux participent à l'ensemble d'indicateurs de base, mais tous ne participent pas à tous les indicateurs. La Flandre souhaite toutefois évoluer vers une participation obligatoire à un ensemble d'indicateurs clés. Selon les résultats, les hôpitaux sont classés en trois groupes :

• inférieurs à la norme
• conformes à la norme
• supérieurs à la norme.

La norme en question est déterminée de plusieurs manières : comparaison avec le résultat moyen des hôpitaux, norme déterminée par des experts et/ou sur une base scientifique ou sur la base de normes légales.

La qualité des hôpitaux en Wallonie

La Wallonie a récemment approuvé un plan stratégique pour ses hôpitaux.  L’une des parties de ce plan concerne la qualité des hôpitaux afin de "soutenir une politique d'amélioration continue de la qualité et une approche axée sur les résultats".

Il se compose de plusieurs piliers assez similaires à ce qui se fait en Flandre. L'objectif est d'avoir une législation en place d'ici mi-2026. 

Quels indicateurs seront utilisés pour contrôler la qualité des hôpitaux ?

Le gouvernement wallon souhaite définir un ensemble d'indicateurs de qualité que tous les hôpitaux devront mesurer, en concertation avec le secteur. L'objectif est que les hôpitaux utilisent les résultats de ces mesures pour améliorer la qualité des soins.

Dans un premier temps, le gouvernement wallon ne prévoit pas de publier les résultats à l'intention des citoyens. Les résultats ne seraient communiqués que dans un second temps et que pour un nombre restreint d'indicateurs.

Les inspections dans les hôpitaux en Wallonie

Le modèle d'inspection actuel est axé sur le respect par les hôpitaux des normes structurelles (superficie des chambres, effectifs, etc.). Le gouvernement wallon souhaite simplifier fondamentalement cette approche. La manière dont les inspections seront concrètement mises en œuvre à l'avenir n'est pas encore claire.

À l'heure actuelle, les rapports d'inspection ne sont pas publiés. En tant que citoyen, vous pouvez toutefois demander un ou plusieurs rapports d'inspection sur la base de la transparence administrative.

Il existe des intentions concrètes de rendre publics les rapports d'inspection des hôpitaux à l'avenir, mais aucun timing précis n’a été déterminé.

Les hôpitaux accrédités

Plusieurs hôpitaux sont accrédités en Wallonie.

Dans le cadre d'une accréditation hospitalière, un organisme externe indépendant se rend à l'hôpital pour évaluer la qualité et la sécurité des soins prodigués aux patients. Elle est réalisée sur la base d'un certain nombre de critères prédéfinis. Une procédure d'accréditation est utile car elle met à l'ordre du jour la question de la sécurité des soins au sein de l'organisation hospitalière. Cependant, les progrès réalisés à certains niveaux à la suite d’une inspection semblent s'estomper avec le temps, parfois même jusqu'au niveau de base.

En bref, le fait de ne pas avoir d'accréditation n'est pas un problème en soi (si la qualité est à l'ordre du jour d'une autre manière au sein de l'hôpital), tout comme le fait d'avoir un label d'accréditation n'est pas une garantie de sécurité pour un hôpital.

Les hôpitaux reçoivent un label d'accréditation pour une période déterminée. Les pouvoirs publics jugent ces accréditations utiles, mais elles se font sur base volontaire.

La qualité des hôpitaux à Bruxelles

Quels indicateurs seront utilisés pour contrôler la qualité des hôpitaux ?

À Bruxelles, une nouvelle législation sur les normes hospitalières a été adoptée en 2023.

Les hôpitaux sont tenus d'élaborer une stratégie "qualité-sécurité", qui doit être révisée au moins tous les cinq ans. Elle porte sur toute une série d’indicateurs comme les infections SARM (Staphylocoque doré) contractées à l'hôpital, la fréquence des escarres contractées à l'hôpital, le nombre de réadmissions imprévues, le respect des exigences en matière d'hygiène des mains, etc.

Dans le cadre de cette stratégie, l'hôpital doit choisir lui-même un certain nombre d'indicateurs de qualité. Chaque hôpital doit établir un rapport tous les cinq ans. 

Les hôpitaux doivent publier leur rapport qualité sur leur site web. Malheureusement, les résultats des indicateurs de qualité mesurés sont confidentiels. À court terme, les citoyens ne disposeront donc toujours pas d'informations leur permettant de choisir un hôpital en connaissance de cause. 

Les inspections dans les hôpitaux bruxellois

Les autorités bruxelloises vérifient si les hôpitaux respectent les normes légales d'agrément. Il s'agit par exemple des appareils de radiologie disponibles, du personnel et de sa formation, etc.

Elles se basent pour cela sur les réponses des hôpitaux à des questionnaires que ceux-ci doivent remplir au moins tous les six ans. Les inspecteurs ne se rendent sur place que lorsqu'une demande est introduite pour certaines nouvelles activités ou pour une modification des activités existantes. La visite des inspecteurs est annoncée à l'avance à l'hôpital, sauf en cas de plainte, auquel cas l'hôpital n'est pas informé à l'avance.

Le rapport d'inspection n'est pas rendu public. En tant que citoyen, vous pouvez toutefois le demander en vertu du principe de transparence administrative.

Les accréditations

Le système est identique à celui expliqué précédemment pour les hôpitaux wallons.

Les hôpitaux wallons et bruxellois sont-ils efficaces en matière d'infections nosocomiales?

Lors d‘une hospitalisation, vous pouvez contracter une infection dite "nosocomiale". Vous ne l‘aviez pas au moment de votre arrivée, mais vous la contractez durant votre séjour à l'hôpital. Elles peuvent compliquer le processus de guérison et donc prolonger votre hospitalisation. Dans les cas graves, l’infection peut entraîner une invalidité de longue durée, voire le décès du patient.

À la suite des procédures engagées par Testachats, Sciensano a développé un outil pour mesurer les efforts déployés par les hôpitaux en matière de prévention et de gestion des infections nosocomiales. Chaque établissement est tenu de participer à l’exercice. Les indicateurs choisis sont divisés en trois catégories :

• L’organisation (par exemple, le nombre de réunions organisées par l’établissement pour aborder les infections nosocomiales).
• Les moyens financiers attribués (personnel responsable des infections nosocomiales, formation du personnel sur la question, etc.)
• Les indicateurs d'action. Ils indiquent dans quelle mesure l'hôpital enregistre systématiquement certaines infections nosocomiales et organise des audits de certaines procédures importantes afin de mieux prévenir les infections. Cet indicateur est le plus important.

Les résultats des hôpitaux en Wallonie et à Bruxelles

La dernière publication de résultats date de 2024 et concerne les données récoltées en 2023. S'il s’avère que les hôpitaux flamands font mieux que les wallons, et les wallons mieux que les bruxellois :

Quels hôpitaux n’ont pas obtenu de bon score ?

En Wallonie, seul le Centre de Santé des Fagnes (Chimay) a obtenu un score faible (58/98), mais plusieurs établissements ont obtenu un score moyen :

À Bruxelles, seuls Les Hôpitaux Iris Zuid ont obtenu un score faible (55/98), mais plusieurs établissements ont obtenu un score moyen :

Les résultats complets sont à retrouver sur le site de Sciensano.

Nos exigences

Ce système est un premier pas dans la bonne direction, mais des améliorations doivent encore y être apportées. Les pouvoirs publics doivent rendre publiques les mesures plus directement liées à la qualité des soins, comme :

• le respect d'une bonne hygiène des mains ;
• l'utilisation correcte des antibiotiques ;
• la fréquence de certaines infections nosocomiales.

Certains des indicateurs actuels sont d'ailleurs une obligation légale. En outre, un système de contrôle doit être mis en place afin de garantir la fiabilité des données. Nous avons déjà formulé ces exigences voilà plusieurs années. Sciensano a remanié son système et prévoit notamment une validation externe des données. Il entrera en vigueur en 2026. Nous l'évaluerons à ce moment-là.

Comment les autorités déterminent la qualité des hôpitaux en Belgique?

Vous l‘aurez compris, la qualité des hôpitaux en Belgique est une question complexe. La responsabilité est partagée entre l'État fédéral et les Régions.

D’une part, la législation impose aux hôpitaux de respecter toute une série de normes pour pouvoir exercer certaines activités de soins. D'autre part, des règles concernent spécifiquement la politique de qualité. Chaque Région détermine les règles en matière de qualité des soins. Il en va de même pour le contrôle et l'évaluation de la qualité.

Cela étant, la qualité des soins n'est pas uniquement déterminée par les règles régionales, par exemple :

• le gouvernement fédéral fixe les règles relatives aux infections nosocomiales et à leur prévention.
• le gouvernement fédéral finance en grande partie les hôpitaux (avec un petit volet visant à promouvoir la qualité des soins).

Le financement des hôpitaux et le système Pay for Performance

Comme mentionné, ci-dessus, le gouvernement fédéral est responsable du financement des hôpitaux. Ceux-ci reçoivent des fonds publics sur la base de différents paramètres. Une très petite partie des fonds est allouée par le gouvernement sur la base de paramètres de qualité. Ce programme, appelé Pay for Performance (P4P), a été introduit en 2018. Il représente aujourd’hui un budget de 40 millions d’euros.

Parmi les indicateurs utilisés, citons par exemple :

• l'obtention d'un certificat d'accréditation
• la mesure de l'expérience des patients
• la participation à l'enregistrement de certaines infections nosocomiales
• le risque de mortalité à l'hôpital.

Un manque total de transparence du SPF Santé publique

Nous avons demandé au SPF Santé publique les résultats des dernières années par hôpital, mais notre demande a toutefois été rejetée.

Les pouvoirs publics auraient notamment promis aux hôpitaux de garder ces données confidentielles. La Commission pour la transparence administrative, à laquelle nous avons demandé conseil, a estimé qu'un tel argument n'était pas valable. Finalement, le SPF Santé publique a continué à refuser de transmettre les données demandées, arguant qu'elles relevaient du secret d'entreprise d'un hôpital.

Le gouvernement fédéral prévoit de travailler à l'amélioration de la qualité et souhaite donc collaborer avec les Régions afin d'élaborer un ensemble d'indicateurs de qualité pour les hôpitaux. Selon nos informations, aucun planning concret n'a encore été établi à ce sujet.

Nos revendications en matière de contrôle de la qualité des hôpitaux en Belgique

Il faut travailler à la mise en place d'un système de qualité uniforme pour toute la Belgique. La Wallonie et Bruxelles peuvent tirer des enseignements de l'expérience de la Flandre.

Les informations relatives à la qualité des soins doivent être accessibles pour tout le monde. Outre la publication des résultats des indicateurs de qualité, les rapports d'inspection et d'accréditation doivent également être rendus publics. Toutes les informations doivent être regroupées en un seul endroit.

Les pouvoirs publics doivent réserver certains soins aux hôpitaux qui disposent d'une expérience suffisante. Le ministre de la Santé Franck Vandenbroucke a récemment mis en œuvre une mesure de ce type pour le traitement du cancer du sein. Cependant, il ne s’agit pas de la seule affection pour laquelle l'expérience de l'hôpital détermine le résultat pour le patient.

Les services d'urgence en Belgique sont-ils efficaces?