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Facture d’énergie plus chère à partir de 2027 : tout ce qu’il faut savoir sur le prix européen du carbone

À partir de 2027, l’Europe introduira un nouveau prix du carbone sur l’essence, le diesel, le gaz naturel et le mazout. Cette mesure, appelée système ETS2, doit réduire les émissions européennes de CO₂, mais elle se fera aussi sentir dans le portefeuille des ménages. Qu’est-ce qui change exactement ? Combien allez-vous payer en plus ? Et surtout, que pouvez-vous faire pour limiter ces coûts ?

 

Expertise:
Rédaction:
01 septembre 2025
Taxe carbone ETS2

Qu’est-ce que le système européen d’échange de quotas d’émissions?

Ce système, abrégé en EU ETS, est un moyen mis en place par l’Union européenne pour lutter contre la pollution. Il constitue un instrument clé de la politique climatique européenne. Depuis 2005, les grandes entreprises industrielles et les producteurs d’électricité paient pour les émissions de CO₂ qu’ils rejettent. Plus ils émettent, plus cela leur coûte. Cela incite les entreprises à produire de manière plus propre et à investir dans des technologies respectueuses du climat.

Pour les ménages, ce système est généralement invisible, mais il a tout de même une influence limitée sur le prix de l’électricité. Les producteurs d’électricité répercutent en effet leurs coûts liés au CO₂, ce qui signifie qu’une partie de votre facture d’électricité actuelle correspond déjà à une taxe carbone.

L’impact le plus fort de l’EU ETS se ressent chez les gros émetteurs : industries de l’acier, du ciment, de l’aluminium et du verre. En 2023, l’EU ETS a contribué à une baisse d’environ 47 % des émissions des centrales électriques et des usines européennes par rapport à 2005.

En résumé : le prix du carbone rend la pollution plus chère, ce qui rend les investissements dans des solutions durables plus attractifs. C’est un élément essentiel de la politique climatique européenne, qui vise à réduire les émissions nettes de gaz à effet de serre d’au moins 55 % d’ici 2030 (par rapport à 1990).
 
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Pourquoi l’Union européenne met en place l’ETS2?

Pour atteindre ses objectifs climatiques, l’Union européenne met en place un deuxième marché du carbone : l’ETS2. Cette nouvelle taxe carbone fait partie du Pacte vert pour l’Europe (European Green Deal) et entrera en vigueur en janvier 2027. Alors que l’ETS actuel cible surtout l’industrie et la production d’électricité, l’ETS2 se concentre sur le transport routier (essence et diesel) et le chauffage des bâtiments (gaz naturel et mazout).

Concrètement, cela signifie que les fournisseurs d’énergie et les entreprises pétrolières comme TotalEnergies, Shell ou Engie devront acheter des droits d’émission pour le CO₂ produit par l’utilisation de leurs produits : essence, diesel, mazout et gaz naturel.

Pour les ménages, cela se traduira par une hausse visible des prix à la pompe et sur la facture de chauffage. Les fournisseurs répercuteront ces coûts supplémentaires sur leurs clients. L’objectif est d’encourager les ménages, à terme, à faire des choix plus verts : opter pour une pompe à chaleur plutôt qu’une chaudière au gaz, mieux isoler leur logement ou encore privilégier les transports en commun.

 
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Comment le prix du carbone est-il calculé?

Le prix d’un droit d’émission est variable et dépend de l’offre et de la demande. Les distributeurs de carburants doivent restituer un droit d’émission pour chaque tonne de CO₂ qu’ils rejettent. Ces droits sont vendus aux enchères et peuvent également être échangés entre entreprises.

Selon une étude récente du Bureau Fédéral du Plan, le prix réaliste au lancement de l’ETS2 serait de 60 € par tonne de CO₂. D’autres prévisions récentes estiment qu’il pourrait atteindre 100 à 150 € par tonne d’ici 2030. Plus la demande de droits d’émission est forte, plus leur prix augmente.

Pour faire grimper le prix du CO₂ de manière progressive, l’UE réduit chaque année le nombre de droits disponibles. Cela doit stimuler l’investissement dans des technologies propres. L’objectif : une baisse de 42 % des émissions en 2030 par rapport à 2005.

 
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Combien paierez-vous en plus pour le chauffage et les carburants?

L’impact précis de l’ETS2 sur le budget des ménages dépendra de :

  • La taxe CO₂ : plus elle est élevée, plus les prix de l’essence, du diesel, du mazout ou du gaz naturel augmenteront.
  • La consommation d’énergie : en fonction, entre autres, de l’isolation du logement, du système de chauffage, du type de véhicule, du kilométrage annuel, etc.

Selon le Bureau Fédéral du Plan, les ménages qui ne modifient pas leurs habitudes verront leur facture énergétique augmenter de 250 à 400 €, selon leur consommation. La hausse concernera surtout le chauffage : +21 % pour le mazout et +16 % pour le gaz naturel. Les prix de l’essence et du diesel augmenteraient d’environ 10 %.

Les automobilistes verront aussi la différence :

  • 15 000 km/an avec une voiture essence (6,9 L/100 km) = +175 €/an
  • 15 000 km/an avec une voiture diesel (6,3 L/100 km) = +180 €/an

Ces chiffres se basent sur un prix du carbone de 60 €/tCO₂. Si ce prix atteint 150 €/tCO₂, les coûts bondissent : environ 550 € pour le gaz et 825 € pour le mazout, 435 € pour l’essence et 460 € pour le diesel. 

Quelles conséquences pour les consommateurs belges?

En 2015, les ménages consacraient en moyenne 3,8 % de leurs revenus au chauffage et 3,7 % à l’essence ou au diesel. Le Bureau Fédéral du Plan estime que l’ETS2 ajoutera :

  • +1,3 % pour les 10 % des ménages les plus pauvres
  • +0,5 % pour les 10 % les plus riches

Sans mesures de soutien, l’impact est donc proportionnellement plus lourd pour les foyers à bas revenus, dont les dépenses énergétiques représentent déjà une part importante du budget.

Les ménages chauffés au mazout seront aussi plus touchés, en raison de la plus forte hausse liée à ses émissions (+21 %). Les personnes seules et les familles monoparentales sont également plus exposées à une augmentation supérieure à la moyenne.

Tanken aan de pomp

L’électricité sera-t-elle aussi plus chère? 

Non. La nouvelle taxe CO₂ ne concerne pas l’électricité. Aujourd’hui, vous payez déjà la taxe carbone sur l’électricité produite par des centrales au gaz, via l’ETS1 en vigueur depuis 2005.

Résultat : les propriétaires de véhicules électriques ou de pompes à chaleur ne seront pas touchés par l’ETS2.

Quels dispositifs pour amortir l’impact de la taxe pour les ménages? 

Pour protéger les ménages vulnérables de l’impact de l’ETS2, l’Union européenne mettra en place, à partir de 2027, le Fonds social pour le climat. Ce fonds doit veiller à ce que la transition vers une société neutre en carbone se déroule également de manière socialement équitable. La Belgique pourra compter sur environ 1,66 milliard d’euros provenant de ce fonds pour la période 2026–2032, complétés par une contribution belge de 0,55 milliard.

Concrètement, le fonds soutiendra les groupes vulnérables par des mesures structurelles telles que des primes pour la rénovation des logements ou un meilleur transport public. En outre, les États membres pourront également octroyer un soutien temporaire au revenu ou des réductions sur la facture d’énergie.

Ces aides directes sont cruciales, car la taxe carbone sera appliquée immédiatement, alors que les solutions structurelles (comme les rénovations) demandent du temps.

Pour pouvoir utiliser effectivement cet argent, la Belgique devait soumettre, avant le 30 juin 2025, un plan social national pour le climat à la Commission européenne. Ce plan doit démontrer clairement comment les groupes les plus vulnérables seront soutenus au moyen de nouvelles mesures ou par l’extension d’initiatives existantes. Ce n’est que lorsque la Commission européenne constatera que les mesures prévues sont efficaces et ciblées, et que les objectifs convenus sont atteints, qu’elle débloquera les fonds.

Le Fonds social pour le climat n’est donc pas un chèque en blanc, mais un levier important pour s’assurer que personne ne soit laissé de côté dans la transition énergétique.

 
 
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Comment limiter l’impact de la taxe carbone sur son budget?

De muren van je woning isoleren

Même si vous ne pouvez pas empêcher l’ETS2, vous pouvez réduire les coûts :

  • Isolez votre habitation : l’isolation du toit, des murs et du sol réduit les pertes de chaleur, ce qui vous permet de chauffer moins avec du gaz naturel ou du mazout. De plus, vous augmentez aussi votre confort de vie. Souvent, des primes à la rénovation ou d’autres mesures de soutien existent pour rendre votre logement plus économe en énergie.
  • Envisagez une pompe à chaleur si votre système de chauffage doit être remplacé. Une pompe à chaleur électrique émet moins de CO₂ qu’une chaudière classique au gaz ou au mazout. Les pompes à chaleur sont écologiques et efficaces, ce qui peut vous permettre d’économiser jusqu’à 70 % sur votre facture d’énergie.
  • Optez pour un chauffe-eau thermodynamique pour le chauffage de votre eau : cet appareil consomme 3 à 4 fois moins d’énergie qu’un chauffe-eau électrique classique. Si vous bénéficiez de primes et de panneaux solaires, le chauffe-eau thermodynamique est la solution la plus écologique et la plus intéressante financièrement pour produire de l’eau chaude.
  • Investissez dans des panneaux solaires : en produisant et en consommant votre propre électricité, vous devenez moins dépendant des prix du marché et vous pouvez réduire votre facture énergétique globale.
  • Envisagez d’adapter vos habitudes de déplacement : utilisez plus souvent le vélo (électrique), prenez les transports en commun ou passez à une voiture électrique (hybride) pour réduire vos frais à la pompe.

Économiser sur votre facture d’énergie est déjà possible aujourd’hui. En comparant les prix et en changeant pour un contrat plus avantageux, vous pouvez facilement économiser des centaines d’euros par an.

Comparez les fournisseurs et les prix

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Que peut faire l’Etat pour protéger les consommateurs?

Pour limiter l’impact de l’ETS2 sur les ménages et les entreprises, des mesures sont nécessaires à différents niveaux.

Au niveau européen, plusieurs pays, dont la Belgique, plaident pour une plus grande transparence sur les prix prévus du carbone. Ils souhaitent également que le commerce des droits d’émission commence plus tôt, en 2026. Cela doit permettre aux gouvernements d’intervenir plus rapidement en cas de fluctuations de prix. De cette façon, l’ETS2 reste à la fois socialement et économiquement viable, et l’adhésion de la société s’en trouve renforcée.

Au niveau national également, des choix sont nécessaires pour que la transition énergétique reste réalisable et abordable. En utilisant l’énergie de manière plus efficace et en réduisant la consommation, le prix du CO₂ pourra être mieux maîtrisé.

Une étape importante consiste à réduire la facture d’électricité. Aujourd’hui, elle est alourdie par de nombreuses taxes et nombreux coûts liés aux politiques publiques, ce qui fait que l’électricité est davantage taxée que le gaz ou le mazout. En supprimant ces coûts de la facture d’électricité, l’électrification deviendrait plus attrayante et le prix du CO₂ augmenterait moins rapidement. Seulement, cela semble plus facile à dire qu’à faire : aujourd’hui, on constate que la facture devient surtout plus chère, notamment à cause des nombreux investissements annoncés dans le réseau électrique.

En outre, les moyens du Fonds social pour le climat doivent être utilisés de manière judicieuse et ciblée. Pas en priorité pour des solutions temporaires, mais bien pour des améliorations structurelles. Le gouvernement doit veiller à mettre en place une politique climatique juste et socialement équitable, où personne n’est laissé pour compte. Cela signifie non seulement compenser, mais surtout offrir un accès à des alternatives durables et abordables aux énergies fossiles. C’est essentiel pour éviter que les consommateurs ne se retrouvent devant le fait accompli, simplement confrontés à des factures plus élevées !

Enfin, une communication claire et opportune est essentielle. Les consommateurs doivent dès à présent savoir quel sera l’impact de l’ETS2 et quelle aide ils peuvent attendre, afin qu’ils puissent faire des choix éclairés pour des projets importants comme la rénovation d’un logement ou l’achat d’un véhicule ou d’un système de chauffage.

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